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Le vrai domicile de l'homme n'est pas une maison mais la route,et la vie elle-même est un voyage à faire à pied. Bruce Chatwin

mardi 28 juin 2011

Iran Zenouz-Jolfa-Poldasht-Maku-Bazargan du 19 au 24.06.2011



Zenouz,le 19.06.2011

Etape:101 kms

Choyés et dorlotés par nos différents hôtes pendant 2 semaines,c'est en forme et pleine de courage que j'imagine reprendre la route,je sens que mon bucéphale piaffe d'impatience à l'idée de reprendre la route. Parfaite jusqu'au bout Golnaz se donnera la peine de venir nous réveiller à 6 h du matin et nous accompagnera dans nos préparatifs. Cette petite famille fera elle aussi partie des rencontres fortes qui auront jalonné notre route iranienne!!
Ayant dûment revêtu ma tenue de camouflage,c'est étonnament sereine que j'enfourche ma monture bien résolue à faire ma place dans le trafic de Tabriz,fort heureusement pas encore trop dense à cette heure matinale. Patrick quant à lui rayonne,tellement heureux de retrouver son vélo,l'espace d'une nuit,j'ai le sentiment que l'on m'a échangé mon mec grognon et renfrogné,c'est son humeur citadine,contre un nouveau tout neuf souriant contre vents et marées,même le trafic et la pollution ne le font pas tiquer!!!!!
Nous sortons sans encombre de la ville pour retrouver la nationale avec sa cohorte de véhicules,camions ils sont encore une fois nombreux en ce jour et tout ce joyeux petit monde nous embaume de ses gaz d'échappement pour le moins asphyxiants. Pour la petite histoire,durant 35 ans la voiture de marque Paykan(qui signifie flèche) était quasiment l'unique voiture que l'on pouvait voir en Iran C'était exactement le type de véhicule peu cher et simple que dont les Iraniens avaient besoin lorsqu'elle fut pour la première fois vendue en 1960. Étant devenue la coqueluche du peuple iranien que lorsque la production a été définitivement arrêtée en 2005,il y avait une liste d'attente de 2 ans pour en posséder une. Tandis que les Iraniens respecte la Paykan pour sa fiabilité ils sont également conscients des effets diaboliques que celle-ci cause sur l'environnement,sa consommation moyenne varie entre 12 et 13 litres de benzine avec plomb aux 100 kms et ne possède pas de convertisseur catalytique..... Tellement mauvais que le gouvernement iranien a payé Iran Khodro pour fermer l'usine. L'Iran compte toujours plus de 2 millions de Paykans(plus de 40% de tous les véhicules),il va encore couler bien de l'eau sous les ponts avant que celles-ci aient complètement disparu de la circulation.
Et désormais la Paykan va couler des jours heureux en Afrique puisque la chaîne de production a été revendu à une compagnie soudanaise!!!!!!! Il est pas beau notre monde!!!!!
Pour une reprise la route se montrera sympathique avec nous,une bande qui nous permet de garder nos miches en sécurité,quasiment plate au cours des 30 premiers kilomètres de paysages urbains,plutôt moches et monotones,usines,immeubles,zones industrielles......jusqu'à Marand,ville jonction grouillante de 130'000 habitants qui serait l'endroit où a été enseveli la mère de Noé!!!!! Pause casse-croûte sur un coin d'herbe au milieu de la circulation,ça y est au bout de 3 semaines dans ce pays nous avons rejoint la cohorte des pique-niqueurs iraniens fous et sommes capables d'avaler notre repas dans n'importe quelles conditions sans oublier de nous régaler!!!!!
Nous arrivons enfin à trouver quelque répit dans ce tohu-bohu infernal lorsque nous rejoignons l'ancienne route qui court de manière parallèle à la nouvelle,quel bonheur de retrouver la tranquillité!!!!!
Les paysages eux-aussi se magnifient,le relief s'accentue,devient vallonné,les paysages urbains cèdent la place à des paysages montagneux,magnifiques petites collines aux couleurs de l'arc-en-ciel,mon vélo chante sur la route tandis que j'avance ventre à terre,sentiment de plénitude et de liberté,je me sens seule au monde et totalement en accord avec tout ce qui m'entoure,plus heureuse que jamais dans ce mode de vie,instants vibrant d'une grande intensité où je saisis profondément le pourquoi de mes choix de vie!!!!!
La chaleur est intense et le soleil darde ses rayons impitoyables sur ces lieux désertiques et bien trop ingrats pour permettre à la vie de s'y installer,nous n'y croiserons pas plus de villages que de troupeaux de chèvres ou de moutons. Nous ne sommes guère éloignés des montagnes et je me dis que forcément à un moment ou un autre la route va se durcir,et bien non la bonne surprise de la journée sera une longue descente d'un peu plus de 10 kms qui nous emmène jusqu'à Zenouz,quelques maisons disséminées aux quatre vents,un arrêt de bus et surtout une cabane à l'abandon au bord d'un petit ru. Nous aurions certes encore l'énergie de continuer un peu mais décidons de saisir cette opportunité et de nous installer là pour la nuit. Patrick retrouve en même temps que sa joie de vivre son rituel préféré ,qui ne le quitte pas depuis le premier jour de route,la préparation d'un nescafé (normal et oui Marie-Noëlle,nos moyens limités ne nous permette pas le gold deluxe),en Europe nous ne le consommions qu'en cas de force majeure,ici il acquiert le goût des meilleurs cafés du monde!!!
Les bergers du coin profitent du soleil qui se couche et de la chaleur qui décline pour emmener leurs troupeaux paître un peu plus haut dans la montagne. Nous nous installons tranquillement pour notre nuit nullement dérangés par âme qui vive.

















Jolfa:Église St Stephanos,le 20.06.2011
Etape: 73 kms


Le matin nous retrouve hâves,les yeux bouffis par la nuit de mauvais sommeil,bercés par le bruit infernal de la circulation et l'aboiement des chiens. On ne peut pas gagner à tous les coups et l'emplacement de notre bivouac ne fut sans doute pas des meilleurs,mais le moral est bon et la pêche bien présente.
Nous retrouvons le calme de l'ancienne route,certes pas toujours en bon état,par moments il faut enjamber les lignes de chemin de fer,mais tellement plus sereine. Paysages vallonnés et semi-désertiques,sauvage à souhait,nombreux troupeaux de chèvres et de moutons,quelques petits maisons de pisé disséminées par ci par là. Nous retrouvons les joies des montagnes russes avant de replonger dans un étroit canyon cerné de hautes montagnes,monde minérale sec et aride avant de rejoindre par une route qui a retrouvé toute sa platitude la ville de Jolfa, 14'000 habitants à l'origine ville arménienne,réputée pour ses excellents artisans,tellement excellents qu'en 1604 Shah Abbas en kidnappa la population entière pour lui construire une nouvelle capitale à Esfahan,où leurs descendant vivent encore à l'heure actuelle. Jolfa est une petite ville frontière (Azerbaïdjan) grouillante et plutôt quelconque,nous nous y arrêtons le temps d'un thé,de quelques approvisionnements avant de poursuivre notre route à destination de l'église de St Stephanos.
A la sortie de Jolfa,nous entrons dans un nouveau canyon au fond duquel coule la rivière Aras,ses eaux claires et cristallines offrent une touche de fraîcheur au sein de toute cette aridité chauffé à blanc par un soleil de plomb,il fait tellement chaud que nous devons fortement réfréner nos envies d'y piquer une petit tête. La rivière marque la frontière avec l'Azerbaïdjan,route hautement sécurisée et militarisée des deux côtés,mais nous n'y serons nullement importunés et pourrons sans encombre poursuivre notre chemin. Notre insouciance est stoppée nette dans les derniers kilomètres lorsque le pourcentage de la route devient tel que nous devons nous résoudre à pousser nos vélos,suant,crachant,ahanant,l'effort est rude,les mètres se gagnent péniblement et je peine tellement à avancer que Patrick s'épuisera dans des allers retours ininterrompus pour que nos bucéphales arrivent enfin à bout de cette côte,je ne peux qu'être admirative face à tant de volonté,il y a franchement des moments où mon poussin m'épate!!!! Au cours de cet effort monstrueux 2 voitures s'arrêteront afin de nous offrir de l'eau fraîche,véritable bénédiction des dieux dans cet enfer que nous vivons,une débauche d'énergie qui nous laissera pantelants et vidés,nous avons à peine déposé nos vélos que nos fameux pique-niqueurs iraniens,présents en grand nombre,manquant pour une fois totalement de civilité,se ruent sur nous,appareil photo en main,ils nous tirent le portrait,curieux comme des poux,nous passons à la question....... c'est le zoo et nous en sommes les vedettes!!!!! Excédés par ce comportement nous nous affalons sur le premier banc venu où nous mettrons un certain temps à réaliser qu'après être passés par l'enfer,nous nous retrouvons au paradis. L'endroit est magique,oasis de verdure plantée d'arbres,l'eau de source y coule abondamment,l'endroit sale et jonché de détritus que nous avions connu il y a 6 ans a fait peau neuve,superbement aménagé et propre,sans doute un grand merci à l'Unesco qui a classé l'église St Stephanos dans ses sites. L'église monastère encore un joyeau de l'architecture arménienne. Bien que St Barthélémy aie en l'an 62 AJC construit une première église sur le site,à l'heure actuelle la partie la plus ancienne date du 14 ème siècle,l'église est en cours de restauration mais sa partie extérieure est superbement décorée de magnifiques croix arméniennes,saints,anges,j'en reste béate d'admiration. Sa situation exceptionnelle au milieu de ces paysages montagneux et sauvages,lui a sans doute permis de survivre aux siècles et à la barbarie humaine. Je me sens exténuée mais je me dis qu'une telle vision valait bien toute l'énergie dépensée pour y parvenir.
Alors que nous commençons à nous installer pour la nuit,le gardien des lieux appelle Patrick pour lui signifier que nous devons retourner à Jolfa pour dormir,il en est hors de question nous y sommes,nous y restons,l'homme semble comprendre notre détermination et ne nous importunera plus. Nous finirons par nous installer sur un des lit (au cours de la journée les gens s'y prélassent en fumant le narguilé et buvant le thé), situé à côté de la cafétéria. L'endroit semble idéal il y règne un calme olympien,malheureusement une fois les nuées de mouches piqueuses couchées ce seront les moustiques qui prendront le relai!!!!! Encore une mauvaise affaire!!!!












































Poldasht,le 21.06.2011

Etape: 67 kms


Encore une mauvaise nuit à notre actif,mais le moral reste résolument bon et la forme physique suit comme elle peut,étonnamment plutôt pas mal et heureusement car l'étape s'annonce difficile. Un vent à décorner les bœufs,bien de face, et un relief franchement agressif,côtes sévères,12% et plus,et descentes se succèdent sans nous laisser le temps de respirer. Notre route étant située au fond d'un étroit canyon,nous sommes entourés de toutes parts par de hautes parois rocheuses,suit le cours de la rivière Aras qui délimite toujours la frontière Azéri. Petit à petit les montagnes rapetissent et finissent par disparaître, les dénivelés s'adoucissent, nous débouchons au milieu d'une vaste plaine,balayée par un Eole impitoyable,qui a pour seul avantage de rafraîchir l'air ambiant. Quelques champs de blé mûr(la récolte est déjà achevée par endroits),colza,luzerne,vergers,troupeaux de vaches,chèvres,moutons. De temps à autres un petit hameau aux maisons de pisé. Malmenés par le vent,moulinant de toutes nos forces pour avancer,la fatigue commence sérieusement à se faire sentir. Le long de cette route désertée en retrait de toute civilisation, les échoppes de thé nous font cruellement défaut. Il n'est pas rare qu'au cours d'une de nos pause sur le bord de la chaussée les voitures s'arrêtent,le chauffeur s'inquiétant d'un éventuel problème et désireux de nous aider. Pour une fois plus vaillante que mon compagnon,je l’entraînerai dans mon sillage le protégeant de ma large carcasse afin de lui rendre l'effort un peu moins difficile.
Poldasht verra arriver un équipage épuisé et assoiffé,l'eau que nous transportons est bien trop chaude pour qu'elle puisse encore nous désaltérer. L'accueil y est comme de coutume des plus chaleureux et la scène de l'attroupement,des questions en rafale se répète inlassablement. Un chauffeur de taxi m'offrira une bouteille de coca tandis que le patron de la boutique nous offrira une bouteille d'eau gazeuse,toujours aussi touchée par autant d'attentions!!!!! Impossible pour nous de repérer un hôtel dans cette petite ville où toutes les enseignes sont écrites en farci, 2 jeunes en moto nous emmènerons jusqu'au Milad Lukanta,petit hôtel sans prétention aux chambres basiques et à l'accueil sympathique. La douche un vrai bonheur qui n'est pas du luxe,les lits même défoncés me semblent être le summum du confort. Il nous reste juste l'énergie nécessaire pour se régaler d'un délicieux repas avant de sombrer dans un sommeil profond!!!!










Maku,le 23-24.06.2011
Etape:54 kms
Malgré l'excellente nuit de sommeil,l'oeil n'est pas facile à ouvrir et nous sommes loin d'être frais comme des gardons. Nous savons l'étape courte et prendrons notre temps tout au long de cette journée. Le vent a baissé d'amplitude,le ciel un peu nuageux nous préserve des grosses chaleurs. Notre étape prend des allures de balades dominicales sur fond de paysages campagnards. La faune est à l'honneur ,nombreux nids de cigognes où les parents veillent jalousement sur leur nouvelle progéniture,martin pêcheur,chouettes et autres oiseaux de toutes formes et couleurs.
Nous passerons un merveilleux moment dans un tout petit village à boire des thés ,qui nous seront gracieusement offerts, en compagnie des campagnards qui se prêteront de bon coeur aux séances photos de Patrick. Quelques belles rencontres,brefs instants de vie partagés autour d'un thé, d'un verre d'eau,un sac de pommes que l'on cueille avant de nous l'offrir et puis il y a toutes ces autres invitations que nous refusons,il y en a tant que si nous les acceptions toutes nous n'avancerions plus.
Maku, petite ville ordinaire de 40'000 habitants nichée au fond d'un canyon aux parois vertigineuses. Comme à Jolfa,le faciès de la population nous raconte la proximité des diverses frontières et l'histoire un peu bousculée de ces lieux,point de rencontres des cultures azéris,turques,kurdes et bien évidemment iraniennes. Les femmes retrouvent robes et couleurs,un vrai plaisir pour les yeux,tandis que les hommes arborent une fière moustache. Le décors de nos futures étapes dans l'Anatolie du nord-est est planté.
La ville est bruyante et malheureusement notre petite chambre du Lalah hôtel n'est pas à l'abri de toutes les nuisances sonores,mais présente l'avantage non négligeable de pouvoir enfin se balader nus comme des vers et mes fesses qui ont dû subir quelque surchauffe au cours de ces dernières étapes en sont franchement reconnaissantes!!!!!!!
Une mauvaise nuit et mes fesses toujours aussi douloureuses nous feront rester une journée supplémentaire à Maku.
























Bazargan(frontière iranienne),le 24.06.2011
22 kms

Mes fesses semblent remises de leurs elles se sentent d'attaque pour remonter en selle,quant à nous,nous ne sommes pas vraiment fâchés de quitter Maku et ses nuisances sonores. Il faut que je me fasse à l'idée l'heure de quitter l'Iran a déjà sonné et nos roues ce matin nous emmènent en direction de la frontière turque. Le Mont Ararat s'est paré de ses plus atours sans se voiler la face de nuages,la nature jouit encore de quelque répit avant de cuire sous le soleil impitoyable qui ne va pas tarder à y darder ses rayons incandescents. Pour l'heure une route quasiment plane et exempte de trafic nous emmène à travers des plaines herbeuses où paissent troupeaux de moutons et de chèvres. Bazargan,petite ville frontalière des plus tranquille,quelques commerces,échoppes de thé où nous dépensons nos derniers rials avant de nous attaquer aux 2 kilomètres de côte pour rejoindre le poste frontière. Rien ne semble avoir changé depuis notre dernier passage il y a quelques 6 ans,le temps s'efface et les souvenirs affluent à ma mémoire comme si c'était hier. Pour la petite histoire lors de notre dernier passage,Patrick avait pris une biture mémorable en compagnie de notre voisin de chambre à Maku,la gueule de bois bien présente,pas vraiment en grande forme. De mon côté,besoin urgent de me rendre aux toilettes,mais voilà qu'en fermant la porte la poignée me reste dans les mains,je me retrouve enfermée dans ces lieux pour le moins nauséabonds et impossible de compter sur Patrick qui cuve comme il peut affalé sur son sac à dos et ne se rend même pas compte de mon absence prolongée,je mettrai quasiment 1 heure pour réussir à me libérer. Le passage de frontière du côté iranien est rapide et efficace et sans que nous ayons eu le temps de nous en rendre compte nous nous retrouvons sur le sol turque où mon premier geste est de me libérer de mon foulard!!!!
Le chapitre iranien est déjà clos et nous restons un peu sur notre faim,visite du pays que nous avons quelque peu sacrifiée en faveur des démarches administratives obligatoires pour le futur de notre voyage.
Ce fut plus une aventure humaine,l'occasion de tisser des liens plus étroits avec les personnes rencontrées,de mieux comprendre le fonctionnement d'une société en souffrance où une majorité de la population cherche par tous les moyens à quitter un pays où sévit un régime politique brimant et insatisfaisant. Le nombre de chauffards présents sur les routes rend la pilule un peu moins dure à avaler!!!!
















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