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Le vrai domicile de l'homme n'est pas une maison mais la route,et la vie elle-même est un voyage à faire à pied. Bruce Chatwin

dimanche 12 juin 2011

Anatolie du sud-est Hosap- Esendere du 28 au 31.05.2011


Anatolie du sud est

Hosap:le 28.05.2011
Etape:62 kms
La gymnastique matinale commence à peine le nez hors de la chambre lorsqu'il s'agit de redescendre tout notre barda du 5 ème étage,je crois que je hais les escaliers encore plus que les grimpettes!!!!Après l'orage de la nuit,un soleil radieux pour commencer cette journée,il n'y a pas à dire c'est bon pour le moral.
Aujourd'hui nous entamons nos dernières étapes turques,celles qui vont nous emmener vers la frontière iranienne,pas moins de 4 cols sont notés sur notre carte et je me prépare psychologiquement pour ces épreuves successives. Heureusement j'ai refait le plein d'énergie au cours de ce séjour à Van et je repars avec les belles images de la petite église d'Akdamar. Plus de douleurs liées à ma chute,je repars dans les meilleures conditions qui soient,il ne me reste plus qu'à pédaler!!!!! En quittant la ville de Van,je suis plus que jamais vigilante par rapport au trafic,qui est important, et je surveille du coin de l'oeil toute portière susceptible de s'ouvrir devant mon nez!!!!!
Nous entrons tout de suite dans le vif du sujet,
dès la ville quittée la route commence à grimper de manière régulière serpentant au sein de paysages arides,collines aux formes arrondies ,un sol pauvre où pousse une herbe rase,seuls moutons et chèvres sont à même d'y trouver de quoi se sustenter,ceux-ci y sont nombreux. L'ascension n'est pas des plus difficile,mais très longue,dans ma tête il faut que je m'arme de patience,que je ne force pas le rythme et accepte ma lenteur tortuesque,seule garantie de durée tout au long de cette étape. Le trafic est bien trop dense à mon goût,beaucoup de camions faisant route vers l'Iran et un immense convoi militaire de tanks transportés à dos de camion,vision qui réveille en moi des images de guerre et de conflits me rappelant la bêtise et la trivialité humaines bien trop présente en ce monde. Je ne sais quelle est la situation politique exacte à l'heure actuelle au Kurdistan,la population étant toujours aussi avare de commentaire sur le sujet,mais tous ces chars me font penser que tout n'est pas aussi tranquille que l'on voudrait bien nous le laisser croire?????
Courage et abnégation finissent par payer,bonheur intense et a n'en pas douter masochiste, de voir enfin le panneau annonçant le col de Kurubas(2225 m),à perte de vue ce ne sont que collines pelées et désertitude,une rude beauté sauvage. La photo rituelle,avant de redescendre en roue libre et cheveux au vent,l'idée de trop redescendre ne m'enchante guère car je sais qu'un autre col m'attend non loin de là, il ne se fait guère attendre,les gambettes à peine refroidies de l'ascension du premier col,qu'il faut remettre en route la machine pour le second,encore une fois montée régulière,chemin faisant la belle vision du lac de Hosap,une route en travaux pour faciliter les choses,le terrain se veut plus accidenté,les collines herbeuses cèdent la place à de petites montagnes rocheuses avec en arrière plan une haute chaîne montagneuse enneigées. Pas de photo rituelle pour ce col,le panneau a été enlevé pour cause de travaux. Dans ce coin du pays la présence humaine est rare et se résume principalement à celle de l'armée.



Une petite descente tranquille au sein de paysages qui ont encore gagné en austérité,le monde minéral reprend tous ses droits et les montagnes se colorent d'une multitude de nuances,de temps à autres se présente une petite oasis de verdure qui ajoute une touche d'humanité à ces lieux qui semblent désertés par toute vie.
Une route en travaux,trous,bosses,pous-sière,montée l'ultime épreuve de cette journée avant d'apercevoir,dominant la vallée du haut de son rocher,le vieux château kurde en ruine de Hosap. La présence d'une station essence laisse augurer la fin de l'étape,l'accueil y est sympathique,on nous offre le thé,la présence masculine y est importante et bien trop machiste pour que nous ayons vraiment envie d'y poser nos bagages. En contre bas Guzel Su,quelques boutiques,échoppes de thé, doit son existence à la présence des nombreux camions faisant route vers l'Iran. Une deuxième station essence,un ancien café internet qui a fermé ses portes,le patron nous en donne les clés afin que nous puissions y passer la nuit,à l'unisson nous poussons un soupir de soulagement,la route et la chaleur ont eu raison de notre énergie matinale.











Baskale,le 29.05.2011
Etape:57 kms
Je ne peux que remercier le ciel d'avoir eu un toit sur la tête,une fois de plus orage et vent se sont déchaînés au cours de la nuit. Au matin le ciel fait grise mine,la pluie menace,nous laissons les clés sur la porte de la station service,un thé particulièrement bon avant de reprendre la route. Contre toute attente la forme est au rendez-vous,la nuit fut des plus récupératrice, le début de l'étape est généreuse avec nous,une douce descente au milieu d'une vallée où coule une petite rivière guillerette,de nombreux et gigantesques troupeaux de moutons s'égayent au sein des pâturages. La région est quasiment vierge de présence humaine. Nous poursuivons à travers une plaine ventée qui a comme des airs himalayens avant de nous attaquer au col de Güzeldere(2730 m),montée rude et longue,le trafic y est incessant et dense,que de camions qui nous encouragent de leur klaxons tonitruants me faisant une tête au carré et me laissant au bord de l'asphyxie. Je ne suis pas peu fière de moi lorsqu'enfin se présente à mes yeux le panneau salvateur indiquant la fin de cette épreuve,2730 m,le plus haut col que je n'ai jamais escaladé en bicyclette,cela pourrait se fêter par un bon rhum mais je me contenterai d'une cigarette!!!!!






Nous replongeons en une descente ébouriffante aux virages en épingle à cheveux,presque effrayante pour moi par moments,la route étant comme à son habitude en fort mauvais état. Nous retrouvons une nature plus verdoyante,quelques cultures,fruitiers,fleurs sauvages,de temps à autres un petit hameau,rivières sur fond de montagnes enneigées,que c'est beau!!!! Pas une échoppe de thé ou une gargote à l'horizon,alors que nous méditons sur cet état de fait,nous sommes invités par une famille avec qui nous partageons thé et un moment des plus chaleureux. Requinqués par ce délicieux breuvage,nous reprenons la route sous un ciel de plus en plus menaçant,la route continue de descendre avant de prendre des formes plus ondulantes,montées et descentes se succèdent,de retour sur les montagnes russes. Un vent tempétueux se met à souffler,des éclairs zèbrent le ciel,Zeus s'exprime à haute et forte voix,l'orage arrive, une pluie cinglante se met à tomber,mais la chose ne paraît pas bien méchante non loin devant moi je vois un beau soleil qui luit. Je tente de pédaler plus vite que le vent,trouve refuge dans une sympathique station essence,nous pourrions y passer la nuit sans souci,mais malheureusement aucun terrain approprié. Il en faut du courage pour reprendre nos bécanes,la fatigue commence vraiment à se faire sentir,la pluie n'est déjà plus qu'un mauvais souvenir,nous n'avons pris que la queue de l'orage. Le retour à la civilisation ne se fait pas sans peine,aux abords de Baskale alors que se profile à l'horizon une patate terrifiante,je n'en peux plus,quelques mômes insolents me prennent la tête de leur caquetage,Nino quant à lui se prendra des pierres,la montée est rude et je devrai mettre pied à terre à plusieurs reprises,un de ces moments où je jetterai bien mon bucéphale dans le fossé. Lorsqu'enfin j'arrive à bout de cet infâme raidillon,comme récompense, l'armée qui me sert sur un plateau un thé.
Les stations essences turques,je ne les remercierai jamais assez,et oui c'est encore dans l'une d'elle que l'hospitalité nous est offerte,les nombreux thés de bienvenue,un hangar pour loger nos bicyclettes qui elles aussi doivent être fourbues et le couloir de la chambre du pompiste comme logis,que demande le peuple???
Nous sommes tous les 3 un peu hagards et à bout de force,une omelette heureux changement dans notre régime quotidien ,fromage pain,gâteaux dans une petite gargote avant de nous écrouler sans demander notre reste sur nos couches,peu importe, si le soleil est encore loin  se coucher!!!!








Yüksekova:le 30.05.2011
Etape:82 kms
Les orages nocturnes et violents que je pourrais désormais qualifier d'habituels,un réveil sous un magnifique soleil et une chaleur déjà écrasante de bon matin. Après Baskale une belle descente à travers des pâturages verdoyants avant de nous enfiler dans une gorge aride au fond de laquelle coule une rivière boueuse au débit impressionnant,la route a la bonne idée d'être quasiment plate et suit le fond de vallée sur toute sa longueur.
Nous débouchons bientôt sur un carrefour,région des plus sensible,une forte présence militaire et un check point en sont la preuve. D'un côté la route s'en va vers Hakari,un des derniers bastions du PKK,pas étonnant au vue du terrain et de la proximité de la frontière irakienne. C'est là qu'ont régulièrement lieu des escarmouches opposant la guérilla et l'armée turque,mais pour les moussafirs(personnes étant loin de chez-elles)que nous sommes,le passage se passera sans incident aucun. De l'autre côté la route que nous emprunterons une fois les formalités remplies,celle qui nous emmène tout droit en Iran,et oui je dois commencer à songer à la fin de la Turquie!!!! Les questions vont bon train et après ce début d'étape plutôt facile,nous nous disons que cela ne peut pas durer et que forcément la route va reprendre ses bonnes habitudes et se remettre à monter,et bien non,nous nous enfilons à nouveau dans une autre vallée et suivrons le cours ascendant d'une nouvelle rivière boueuse,les gigantesques troupeaux de moutons sont toujours omniprésents,à notre passage la voix des bergers résonnent et les mains se lèvent,la route est très encaissées,un long faux plat,étonnament le trafic quasiment inexistant et nous profitons pleinement de ces moments où nous pourrions avoir le sentiment d'être seuls au monde.
En sortie de vallée,se matérialise une vaste plaine avec en toile de fond baignée de sa brume de chaleur,la chaîne montagneuse enneigée des Hakaris. La route plate en voie d'agrandissement est un vaste chantier,où des travailleurs surexcités nous offrent un dernier thé,Patrick se verra offrir un gilet jaune fluorescent,avant que nous ne regagnons les faux bourgs de Yüksekova où paissent de nombreux troupeaux de vaches.
Yüksekova,une grande ville de 60'000 habitants où règne une animation intense,alors que nous sommes assis à la terrasse d'une petite échoppe de thé,nous attirons tous les regards,les touristes ne doivent pas être légion dans le coin,e,je me sens un peu comme au zoo. Nous y faisons la connaissance d'Aziz,grâce à son aide et à son excellent espagnol,nous trouvons une chambre qu'il^nous négociera de main de maître à un prix défiant toute concurrence( 4 € par personne)où nous attend une douche d'autant plus appréciée qu'elle n'était pas prévue!!!!!
Un hasard incroyable nous fera revoir Mustafa et son ami,2 des membres de l'équipe de basketball rencontrés sur la route de Silvan quelques jours auparavant.
Après avoir fait peau neuve,nous rejoignons Mustafa qui possède un petit magasin de musique,joie et bonheur des retrouvailles,il nous invite pour un repas gargantuesque dans une petite lokanta,pide,köfte,lamachun,salade,nous sommes au bord de l'explosion!!!
Malgré la fatigue,je n'ai qu'une envie dormir,nous acceptons son invitation. Pour commencer un tour de Yüksekova by night, derrière les façades pimpantes de la rue principale,des quartiers délabrés aux ruelles défoncées où les maisons arborent des tags du PKK,réalité d'une Turquie qui affiche une belle santé économique,mais pour qui le chemin vers la vraie modernité et des conditions de vie décentes pour tout un chacun est encore long!!!!!! Il nous emmènera ensuite chez-lui, dans une joyeuse agitation y vit une nombreuse famille, enfants,femmes,mères,belle-mère,frères,soeurs,cousins,cousines....... Nous y sommes accueillis à bras ouverts et avons quelques peines à les quitter tant ils aimeraient nous retenir. C'est avec regret que nous regagnons notre hôtel,il se fait très tard et nous sommes obligés de réveiller le taulier. La trop brève nuit accompagnée de son sommeil de plomb sera des meilleure.


















Esendere,le 31.05.2011
Etape:43 kms
A l'heure actuelle,il fait tellement chaud qu'il vaut mieux partir tôt,mais savons l'étape courte et pour une fois prendrons le temps de nous préparer. Cette dernière journée en terre turque sera à l'image de toutes les précédentes,une gentillesse et une générosité omniprésentes,thé,pain nous seront offerts.
Un début d'étape plat à travers des paysages similaires à ceux de la veille,sur une route bien moins circulante que prévue,avant de commencer l'ascension du Dilezi (2'100 m)l'ultime col de ce périple turc,la chaleur est écrasante et c'est suante,le visage rouge comme une crête de coq que j'arriverai enfin au sommet. Le reste de l'étape une rigolade,une longue descente sur les 25 derniers kilomètres,bonheur de se laisser porter sans avoir à donner un coup de pédale,mais le rêve prend fin en même temps que la route se dégrade complètement pour faire place à une vulgaire piste et un vaste chantier de construction,les dernières bornes qui n'en finissent pas se feront dans la douleur des chaos qui me font tressauter sur ma bicyclette,véritable exercice de style pour garder l'équilibre.
Esendere,poste frontière avec l'Iran,un triste no mans land crasseux à l'ambiance morne. Juste une ou deux maisons,un petit commerce et un bâtiment de la commune où s'agitent mollement quelques fonctionnaires qui gracieusement nous offriront le thé. La permission nous est donnée de dormir dans le «parc»un carré de ciment et des arbres où sont posées quelques tables,ce n'est pas le nirvana,mais cela fera l'affaire pour la nuit. Un petit coup de ménage promptement effectué par les garçons avant d'y installer nos couches,rendra l'endroit tout à fait acceptable. Nous aurions pu quitter Yüksekova beaucoup plus tard,l'après-midi est à peine entamer et à part bailler aux corneilles,rien à espérer de ce trou à rat,jamais vu une frontière aussi peu animée!!!!!
Turquie tu ne fus pas toujours tendre pour mon corps mais tellement douce et généreuse pour mon coeur et mon âme,je commence à réaliser pleinement que demain je vais te quitter,séparation qui ne sera que momentanée puisque mon itinéraire m'emmènera à nouveau sur tes routes et tes chemins de l'Anatolie du nord est,alors ce n'est qu'un au revoir!!!!









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