Bouizarkane,le 4.11.10
Etape:42kms
Cette ville de passage et de commerce doit sans aucun doute renfermer un certain nombre de margoulins,tel Omar que nous croiserons au moment de notre café,parlant très bien le français,de la famille émigré dans ce pays lui-même y a vécu,à l'heure actuelle travaille en Mauritanie,me dira dans un premier temps qu'il y est mécanicien avant de nous dire qu'il s'occupe d'acheter des voitures au Maroc afin de les revendre en Afrique noire.Très poli et attentionné il nous donne divers conseils dont celui d'acheter des cigarettes américaines au marcher noir qui nous serviront de monnaie d'échange une fois dans le désert, celles-ci nous permettront de nous mettre en bon terme avec l'armée,de négocier gratuitement un endroit où dormir et de nous attirer des faveurs en tous genres.Il tient absolument à ce que Patrick l'accompagne afin de lui indiquer les lieux où se procurer la marchandise.Patrick le suit et bien évidemment Omar aimerait que Patrick fasse affaire tout de suite,1paquet de cigarettes ne coûtant que 20DH,la chose semble étrange un paquet de cigarette marocaine Marquise ne valant que 17,5DH. Patrick s'en sort en arguant qu'il n'a pas d'argent sur lui.Nous sentons bien que le bonhomme n'est pas clair mais sans savoir vraiment de quel manière,ce n'est que plus tard en papotant avec un bonhomme qu'il me dira au cours de la conversation que le paquet de cigarettes de contre bande ne coûte que 10DH,mais sont le plus souvent dégueulasses, la date de consommation ayant expiré depuis longtemps.Les débuts de cette matinée sont un peu chaotiques,Patrick ayant décidé d'effectuer le change de nos euros à la poste, se verra dire après une éternité de poireautage, que l'ordinateur ne marchant pas impossible d'effectuer la transaction et puis c'est notre petit déjeuner que nous ne trouvons pas les prix annoncés étant bien trop prohibitifs.Nous réussissons finalement à partir,l'estomac vide mais le plein de vache qui rit,pain et oeufs dans les sacoches.Les Marocains n'étant pas vraiment fiables quant aux renseignements pratiques, nous partons dans l'inconu ne sachant pas ce que nous allons trouver comme hébergement sur notre route.Pour l'heure une seule certitude et pas des plus agréable Eole est encore bien présent à nos côtés pour cette étape et nous en fera voir de toutes les couleurs.Mais fort heureusement le terrain est plat.Mes jambes telles des métronomes rythment la mesure de manière soutenue et malgré tout je n'avance qu'à une allure tortuesque,quel misère d'avoir un terrain aussi plane et d'avancer aussi lentement.Il n'y a qu'une chose à faire m'accrocher à mon
guidon,me mettre sur le petit plateau et mouliner tant que je peux,les paysages sont pour moi tellement magnifiques qu'ils arrivent à divertir mon esprit de l'effort à fournir,lentement mais sûrement j'avance,tant que je ne recule pas c'est l'essentiel et à chaque kms gagné à la force du mollet comme une rengaine je me dis que ce qui est fait n'est plus à faire.Malgré tout je me sens envahie de bonheur de me trouver au milieu de ces paysages lunaires et pelés où austérité,inhospitalier peuvent se conjuguer à tous les temps.Mes yeux bien souvent s'écarquillent d'admiration devant ce que mère nature est capable de produire.A l'évocation du mot désert certaines personnes pourraient s'imaginer des paysages uniformes et ennuyeux,la longue ligne serpentine de goudron m'emmène à travers des paysages tantôt pierreux ou sableux,de temps à autres un arbre poussé là comme par miracle,les montagnes elles aussi sont changeantes formes et couleurs ne sont jamais les mêmes.Pour moi la chose la plus extraordinaire est le peu de trafic existant dans ce no mans land empli de calme minéral.Sentiment d'être seule (exception faite de Patrick bien évidemment) au milieu de nulle part,et je me sens comme une puce minuscule sur le dos de l'univers,il n'en faut pas plus pour que je me sente exaltée et infiniment reconnaissante envers le créateur de tout cela,j'aimerais que cela puisse durer longtemps voir très longtemps,je me sens bien loin de toute civilisation.De temps à autres au loin un hameau,j'apercevrai quelques chameaux,troupeaux de chèvres qui se régaleront de nos pelures de bananes et de mandarines,elles doivent être vraiment affamées!!!Notre calvaire éolien prendra fin à Bouizarkane toute petite bourgade où nous avons le bonheur de trouver de quoi nous loger, certes basiques,mais propre et 60DH avec douche chaude et là encore nous bénéficions d'un accueil des plus chaleureux, l'hôtel anti-Atlas.Les rues de la bourgade sont des plus poussiéreuses,elles sont tranquillement animées par la population locale qui s'en revient du souk les mains chargées de sacs pleins à craquer de fruits et légumes.Un immense souk se tient non loin de là,nous nous empressons de nous y rendre afin d'acheter de quoi nous confectionner une succulente salade,nous disant qu'en avançant dans le désert il nous sera sans doute plus difficile de trouver des denrées fraîches.Je ne sais plus où donner de la tête tant fruits et légumes ont l'air appétissants,on y trouve de tout,du choux-fleur à l'avocat en passant par les aubergines,poivrons,betteraves et j'en passe,il en va de même pour les fruits,mandarines,bananes,grenades.........un vrai bonheur.Sur le chemin du retour nous faisons la connaissance d'un jeune marocain qui tient une boutique de fringues,enjoué et rigolant tout le temps il ne rêve que de femmes et d'émigrer en Europe, il nous demandera même de lui trouver une vieille gazelle afin de pouvoir partir dans le pays de ses rêves.Il nous présentera un ami,qui lui vit et travaille en France à Paris dans le 3ème arrondissement comme ingénieur, et n'a plus quant à lui même si il y vit bien les utopies de son ami quant à une émigration européenne,il nous dit que cela fait des années qu'il tente de lui expliquer les difficultés d'une vie européenne,mais son ami reste hermétique et campe sur ses positions.Excellent moment passé en leur compagnie.Bouizarkane n'aura été encore une fois qu'une ville étape mais bien agréable,un de ces endroits où je n'aurai passé qu'un bref instant mais dont j'aimerai me souvenir.
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