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Le vrai domicile de l'homme n'est pas une maison mais la route,et la vie elle-même est un voyage à faire à pied. Bruce Chatwin

dimanche 27 mars 2011

Jordanie Irbid -Amman du 24 au 27.03.2011



Irbid- Amman 24-27.03.2011

Jaber(frontière syrienne)-retour
Etape:51 kms
Le ciel ne se montre guère clément en ce jour,pendant que nous préparons nos vélos pour reprendre la route se déchainent de violentes ondées,mais nous n'avons pas vraiment le choix,notre visa jordanien arrive bientôt à échéance. Bien reposés, nous n'avons pas envie de passer une journée supplémentaire à Irbib,même si la ville n'est pas désagréable. J'ai tout de même hâte de régler la question du passage de frontière,pas évident de rester dans l'expectative,mais les indécrottables optimistes que nous sommes n'ont pas beaucoup de doute quant à la réussite de leur entreprise et c'est confiants dans la vie et les êtres humains que nous taillons la route.
Deux options s'offrent à nous le poste frontière de Ramtha,mais ce n'est pas la bonne pioche,depuis une semaine des événements violents localisés à cet endroit se déroulent du côté syrien,occupation de la mosquée,manifestations et violence,22 morts à ce jour,nous n'allons pas nous mettre dans la gueule du loup,il semblerait que la Syrie soit elle aussi prise par le vent de folie révolutionnaire soufflant sur le Moyen Orient en ce moment. La deuxième et ultime option le poste frontière de Jaber. En Jordanie en règle générale impossible de connaître les distances d'un lieu à un autre,aucun panneau routier ne signalant le nombre de kilomètre(à part sur la route d'Amman)et notre carte étant bien trop imprécise,c'est toujours un peu la surprise.
Le trafic est important,principalement des camions faisant route vers la Syrie,Turquie et l'Irak,la route est comme il se doit fatiguée à bien des endroits,mais pour une fois les kilomètres défilent sans trop de difficulté,quasiment plane voir descendante,un vrai bonheur. Petites collines herbeuses,quelques vergers en fleurs et surtout de nombreux troupeaux de moutons qui de manière impressionnante empestent l'air de leur forte odeur d'urine(cela vaut bien nos porcheries bretonnes).
Nous avançons gaillardement tout heureux de passer entre les gouttes,lorsque les foudres du ciel nous tombent dessus à quelques kilomètres de la frontière,nous trouvons refuge dans un petit magasin au milieu de nulle part vendant,lait,yoghourt,fromage de brebis tout en faisant office de tea shop,son sympathique propriétaire nous offrira un thé tout en nous disant que nous ferions mieux de rester en Jordanie pour lui la Syrie n'est pas bien.
Nous voilà enfin arrivés à la frontière l'heure de vérité va sonner. Nous sortons de Jordanie non sans nous être acquitter de la taxe de départ 8€. Nous nous présentons aux bureaux de l'immigration syrienne,remplissons les formulaires en bon et du forme,l'officier en charge,fort sympathique et souriant au premier abord, nous pose diverses questions,nous demande de nous assoir,requestions,nous demande de patienter et s'en va,nous avons l'impression que l'affaire est dans le sac,mais voilà qu'à son retour il n'a plus la même tête,son sourire est resté coincé quelque part entre ses allers et venues,et le verdict tombe,nous ne pouvons pas entrer en Syrie,nous devons retourner à l'ambassade d'Amman afin d'obtenir un visa. A notre tour de changer de tête,mais nous n'avons pas l'intention de lâcher le morceau aussi facilement,calmement nous tentons de plaider notre cause,mais rien à faire notre interlocuteur fait la sourde oreille,nous disant que la décision vient de son chef,demandons à parler à ce dernier,là encore le non est catégorique. Faisons le sit in et le forcing et finissons par débouler dans le bureau du dit chef, qui nous reçoit de manière quasi hystérique,tout agité il psalmodie de grand non qu'il répète à l'infini tel un mantra là encore cela sent le roussi, et je n'ai plus guère d'espoir,mais Patrick tête de mule comme à son habitude,ne veut pas lâcher(et ma foi je me range à ses côtés car il y a bien des fois où sa tête de mule a porté ses fruits).Régulièrement on nous demande de partir et tout aussi régulièrement nous répondons par la négative,ils ne savent plus que faire de nous et tour à tour différentes personnes viendront nous voir nous répétant les mêmes choses mais nous insistons,le chef fait mine de téléphoner à Damas nous dira-t-il et la décision vient de là et reste négative,il se plante devant sa télévision et nous ignore superbement. Plus de doute à avoir nous sommes vaincus, la cause est perdue,la déception est grande,mais nous avons fait le maximum,et tel Napoléon lors la bataille de Waterloo, nous décidons de lever le siège et au moment de partir,la situation prend des tournures de Berezina lorsque nous surprenons un des douaniers qui se fout de notre poire,il n'en faut pas plus à Patrick pour sortir de ses gonds et se ruer sur le malotru,l'autre tout aussi belliqueux se lance dans la bataille et ils en viennent bientôt aux mains, les douaniers en émoi, s'interposent entre les deux belligérants,tirant et poussant pour les séparer,tandis que l'un y va de son encu....,l'autre répond par fuck.....(je n'avais jamais vu un douanier utiliser un tel langage),finalement nous arrivons à entraîner ,un Patrick content et soulagé d'avoir pu donner un coup de pied à son adversaire,à l'extérieur,mettant ainsi un point final et définitif à ces heures de cauchemar. Je ne peux m'empêcher d'imaginer des alarmes rouges hurlantes et clignotantes se mettant en branle à l'évocation de nos noms aux postes frontières ou dans les ambassades syriennes. Pour Patrick ce n'est que pur fantasme de ma part.
Nous ressortons bredouilles et déconfits sous une pluie battante et reprenons le chemin de la frontière jordanienne,non sans être dûment accompagnés jusqu'à la sortie. En Jordanie,nous passons d'un bureau à un autre,attente,explications,attente,notre sortie de Jordanie annulée,mais bien évidemment sans que nous ne puissions récupérer notre taxe de sortie!!!!!!
Reprenons la route de Irbid,la pluie redouble de violence,le vent glacial se met de la partie,rapidement trempés(surtout Patrick moi j'ai mon Gore Tex!!!!)et glacés jusqu'aux os,la visibilité est des plus mauvaise et la route en devient dangereuse,nous trouvons à nouveau refuge dans le petit magasin du matin où notre ami qui se prénomme Bernard (grâce à un ami français de son père chauffeur routier)nous reçoit chaleureusement en nous disant je vous avais bien dit de ne pas aller en Syrie!!!! La pluie ne cède pas et la nuit commence à poindre,nous tentons de faire sans succès du stop,lorsque Bernard nous propose de dormir sur place,proposition que nous acceptons avec gratitude. Tous trois enroulés dans des couvertures et transis de froid,nous regardons la pluie et la nuit tomber,je me marre en imaginant le tableau que nous devons représenter. Reste que nous n'avons quasiment rien à manger,avions décidé de voyager léger et de faire le plein en Syrie,et plus que 2 malheureux dinars(2€) en poche. Nous partageons en compagnie de Bernard notre frugal repas avant que ce dernier ne fasse son lit sur le comptoir de sa boutique tandis que nous nous installons dans la pièce d'à côté,et c'est avec grand bonheur que je rejoins la chaleur douillette de mon duvet. C'est ainsi que se terminera cette parfaite journée de merde,inhérente à tout voyage. Mais demain est un autre jour,malgré les épreuves de cette journée,la déception est grande mais le moral est au beau fixe,la nuit porte conseil et il n'y a pas de problème mais que des solutions comme disait l'autre!!!!




2ème étape:Amman: 27 kms
A mon réveil un petit rayon de soleil réussit à se frayer un chemin entre de gros nuages noirs et menaçants,contre toute attente la nuit fut bonne et c'est avec sérénité que nous tenons un conseil de famille afin de savoir quelle attitude adopter face à cette nouvelle situation. Les données sont simples,nous n'avons quasiment plus rien à manger et toujours aussi peu de sous que la veille en poche,nous sommes vendredi et les banques sont fermées et quelle que soit la solution de notre problème actuel,tout se passe à Amman,(soit visa à l'ambassade syrienne ou vol pour la Turquie), qui se trouve à quelques 100 kilomètres de là. Première urgence se procurer de l'argent, pour se faire nous reprenons le chemin de la frontière afin d'y faire du change,nous passons sans encombre les check points,c'est soulagés d'avoir à nouveau quelques liquidités que nous retournons sur nos pas et là muchkila (problème),le douanier veut voir le tampon d'entrée en Jordanie datant de ce jour,et comme nous ne sommes jamais sortis pas de tampon d'entrée,je lui explique calmement la situation,il fait mine de ne pas comprendre et nous demande de retourner au poste frontière afin d'obtenir le fameux tampon encore une histoire de fou!!!! Je ne m'énerve surtout pas et recommence mon histoire, une fois que ce cher douanier m'a bien montré qui détenait le pouvoir il part d'un grand éclat de rire me disant qu'enfin il a tout compris et il nous laisse partir en nous souhaitant la bienvenue en Jordanie,ouf!!! cela aurait pu devenir beaucoup plus compliqué!!!! Nous avons eu chaud aux fesses!!!!! et c'est bien le seul endroit où nous pouvons avoir chaud,un vent froid digne de notre bise européenne s'est levée,nous sommes transis de froid et nos ventres faméliques crient famine,c'est bien nous avons de l'argent mais pas une gargote ou une épicerie à l'horizon,nous partageons chrétiennement le seul pain et les deux vaches qui rit qui nous restent,tout en tentant sans y croire de faire du stop et là oh miracle un pick up s'arrête et est d'accord de nous emmener sur les 40 prochaines bornes,nous chargeons les vélos et c'est parti,mais dieu qu'il fait froid à l'arrière de la voiture,j'ai l'impression que je n'aurai pas assez du reste de ma vie pour me réchauffer. Nous voilà de retour sur la chaussée prêts à effectuer les 40 kms restants,une fois encore je lève le bras pour la forme et le miracle se reproduit,une nouvelle voiture s'arrête et cette fois-ci c'est encore mieux,elle va jusqu'à Amman,nous n'en revenons pas de notre chance et c'est bien au chaud que les kilomètres et les paysages,collines pierreuses,peu cultivables où paissent de nombreux troupeaux de moutons,défilent.
La première vision d'Amman, est des plus surprenante, le vert n'y existe pas et les maisons construite à flan de colline semble s'intriquer les unes dans les autres un peu comme des légos et ont tendance à se confondre avec l'environnement rocailleux. Lâchés aux portes de la ville,nous n'avons plus qu'à remonter sur nos bicyclettes pour une folle descente abrupte(les freins chauffent tandis que nous nous gelons)tout d'abord à travers une vaste zone industrielle avant d'aborder la ville proprement dite,son marché aux puces digne de celui de Montreuil où flânent les badauds en ce jour de repos hebdomadaire. Il est difficile de se repérer dans cette ville aux ruelles vertigineuses dotées d'escaliers qui en rendent l'accès impraticable pour nos bucéphales,de fréquents arrêts afin de demander notre chemin seront nécessaires, suscitant rapidement un attroupement de personnes curieuses et bien intentionnées, toutes prêtes à nous aider. Je me sens toujours aussi émotionnée par tant de gentille et d'amabilité. Les petits hôtels miteux à des prix défiant toute concurrence ne manquent pas et nous n'avons que l'embarras du choix qui se portera sur le al Amawi,certifié pur local (AOC),une chambre rudimentaire à la propreté toute relative pour la modique somme de 6 JD(6€),mais au personnel fort sympathique,pas mal pour une capitale,nous ne demandons pas mieux. Quasiment morts d'inanition nous nous remplirons le ventre de Humus(purée de pois chiche mélangée à de la pâte de sésame),de fuul(haricot rouge cuisiné avec des oignons,de la tomate,de l'huile d'olive,du piment et du citron), de falafel (boule frite faite de pâte de pois chiche épicée) et de gâteux à la pâte de datte de quoi faire hurler d'horreur n'importe quelle diététicienne. Depuis que je fais du vélo j'ai l'impression d'être un estomac sur patte et suis impressionnée par la quantité de nourriture que je peux ingurgiter,je vais bientôt croire que je fais du vélo juste pour pouvoir manger autant et ne croyez surtout pas qu'il en va autrement pour Patrick. Rassasiés et heureux nous pouvons enfin nous poser et il ne nous sert à rien de nous affoler aujourd'hui et demain tout est fermé!!!!!!


Amman,le 26.03.2011
Amman,capitale du pays,2,5 millions d'habitants,située à une altitude de 850 m. Suite à la formation de l'état d'Israël en 1948,la ville a absorbé un flot massif de réfugiés palestiniens et a vu sa population doubler en l'espace de deux semaines,impressionnant tout de même. A l'heure actuelle la ville est divisée en deux quartiers bien distincts,le Amman oriental,conservateur et islamique dans ses sympathies c'est là que résident la vaste majorité des «pauvres urbanisés» en contraste avec le Amman oriental,un monde à part avec ses quartiers résidentiels,bars,cafés,galeries d'art,où vivent de nouvelles générations éduquées,tolérante,ouverte d'esprit qui repoussent les frontières d'une vie culturelles longtemps bridées par les conservateurs islamiques. Inutile de vous dire dans quel quartier nous résidons!!!!!
La ville est plutôt tranquille et s'y balader est loin d'être déplaisant,la population y est amène et d'une affabilité toute jordanienne. Nous sommes toujours en stand by, nous en profitons pour musarder et jouer aux touristes en attendant l'ouverture de l'ambassade syrienne et des compagnies aériennes,c'est demain que tout se joue!!!!! Un jour de repos supplémentaire qui devrait rassurer notre «maman» Christiane!!!!




Amman,le 27.03.2011
Dimanche,alors qu'en Europe la population se prélasse,profitant de ce dernier jour de repos hebdomadaire,ici la semaine commence,la ville comme moi se réveille tôt,la vie urbaine professionnelle reprend ses droits. Nous reprenons notre bâton de pèlerin,pour jouer la dernière carte qu'il nous reste et prenons le chemin de l'ambassade syrienne,non sans avoir englouti une bonne omelette. Je n'ai guère d'espoir et le fais plus pour la forme, histoire de n'avoir aucun regret,Patrick quant à lui est plus optimiste et contre vents et marées il y croit toujours.
Première mauvaise surprise après 4 kilomètres de grimpette à travers les quartiers opulents,résidentiels et modernes de la ville, nous apprenons,une fois arrivés à destination que l'ambassade a déménagé,(ironie du sort se trouvait juste à côté de l'ambassade suisse). Un taxi pour nous rendre à son nouvel emplacement,nous sommes un peu en avance,et c'est anxieusement que nous attendons que les employés prennent place derrière leur guichet. Nous nous avançons résolument tout sourire,je débite mon histoire et pas besoin d'attendre bien longtemps la réponse tombe comme un couperet,aucune possibilité d'y obtenir un visa,l'ambassade ne peut le fournir qu'aux personnes résidant en Jordanie depuis au moins un an,de plus ils ne détiennent pas l'autorité pour contrevenir à la décision qui a été prise lors de notre tentative de passage à la frontière. Nous avons beau essayé de négocier et plaider rien n'y fait,une petite lueur d'espoir cependant lorsque l'employée à bout de nerf nous demande de nous assoir tandis qu'elle va exposer notre cas au consul,mais la réponse reste catégorique,négative et définitive.
Il ne nous reste plus qu'à effectuer les démarches nécessaires à l'achat d'un billet d'avion. La Jordanie est loin d'être une destination économique et pour nous se pose toute la difficulté de voyager avec nos vélos et l'excédent de bagage que tout cela représente. Un vol à destination d'Istanbul demain dans la nuit.
C'est ainsi que se termine notre aventure en Jordanie,petit pays des plus tranquille au milieu de ce Moyen Orient qui vacille sous la violence révolutionnaire,superbe découverte si il en fut j'en garderai tant de magnifiques images et je pense que la chaleur de toutes les rencontres effectuées le long de ces routes bien souvent ardues me réchauffera le coeur pendant longtemps encore. J'imagine que pour beaucoup de nos proches le soulagement de nous savoir quitter cette partie du monde sera grand,
cela me sert un peu de consolation et m'aide à digérer la déception de n'avoir pu admirer toutes les beautés que nous réservaient la Syrie.
C'est cependant très heureuse que je m'apprête à retrouver la Turquie et sa magnifique ville d'Istanbul qui me ramènera sur les pas de mes premières vacances passées en compagnie de Patrick. A tout bientôt pour la suite de nos tribulations!!!











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