Turquie
Beysehir,le
9.05.2014
Etape:108
kms
Nous
ne saurions quitter Konya sans rendre une dernière visite au
Mevlana,étincelant de beauté sous le ciel chargé d'une météo
chagrine.
Il est facile de quitter la ville. Vent dans les
fesses,roues de mon bucéphale accrochant sur une route fatiguée
amorçant une très longue montée au sein de paysages
austères,collines rocailleuses où rien ne pousse,nature hostile
sans âme qui vive.
Le col de Belenbasi Beli(1460 m),atteint,je pourrais m'imaginer au bout de cette première épreuve,une colline en cachant une autre,l'effort se poursuit,fort heureusement comme le dit si bien Patrick,la montée est régulière,et un Eole magnanime fait toute la différence,ce n'est pas sans une certaine jubilation intérieure que je vois apparaître le panneau Hanönü Beli(1560 m),deuxième col de la journée. La froidure a fait depuis longtemps fuir mon poussin beaucoup plus véloce,aucune envie de m'attarder en ces lieux hostiles balayés par le vent.
Le col de Belenbasi Beli(1460 m),atteint,je pourrais m'imaginer au bout de cette première épreuve,une colline en cachant une autre,l'effort se poursuit,fort heureusement comme le dit si bien Patrick,la montée est régulière,et un Eole magnanime fait toute la différence,ce n'est pas sans une certaine jubilation intérieure que je vois apparaître le panneau Hanönü Beli(1560 m),deuxième col de la journée. La froidure a fait depuis longtemps fuir mon poussin beaucoup plus véloce,aucune envie de m'attarder en ces lieux hostiles balayés par le vent.
Stupéfiant
changement de décor,descente échevelée au sein de superbes
paysages alpins,éperons rocheux,montagnes de forme et couleurs aussi
disparates que variées,pins,fruitiers,arbres d'eau,troupeaux de
moutons. Région toujours aussi peu habitée,les stations essence ont
disparu,seules quelques lokantas jalonnent notre parcours.
Pluie,vent dans le
nez,route légèrement ondulante,20 kms avant Beysehir,petits
villages,champs de blé,troupeaux et à mon grand soulagement,qui ne
sera que de courte durée,stations essence,elles sont légion,refont
leur apparition. La surprise du départ,cède la place au
découragement,lorsque toutes nos demandes de couchage,finissent par
une fin de non recevoir,Yok(non),réponse inhabituelle maintes et
maintes fois répétées,en contrepartie,on nous offre le thé,c'est
déjà ça,il fait un froid de canard.
Beysehir(70'000
habitants),ville moderne,sise au bord du somptueux lac au nom
éponyme,conditions climatiques,fatigues m'empêchent de profiter
pleinement du panorama. Tournons,virons,écumées en vain toutes les
stations essence,gorgées d'eau les rives du lac,ne permettent pas de
planter notre guitoune,c'est la galère.....En désespoir de
cause,nous nous rabattons sur la gare routière où permission nous
est donnée de nous installer dans son hall pour la
nuit,soulagement,peut-être pas le nirvana,mais au moins sommes-nous
au chaud,quant à la nuit que nous allons y passer,seuls dieu ou
Allah le savent !!!!!! Thé et délicieux plat réconfortant avant de
plonger dans nos duvets sous le regard interrogateur des voyageurs en
partance.
Derebucak,le
10.05.2014
Etape:63
kms
Voix stridente ululant dans un haut parleur,tirée brutalement de mon sommeil de plomb,fort heureusement mon lit à même le sol m'évite une chute certaine,la nuit fut étonnament bonne,dommage du peu. Avant de décoller visite du vieux quartier se réduisant à peau de chagrin,la superbe mosquée Ercefoglu(classée par l'Unesco),vieilles maisons déglinguées..... c'est beau et valait bien un petit détour.
Le lac
Beysehir,plus grande étendue d'eau douce de Turquie,ondes d'un bleu
opalin dans lesquelles se reflètent,chaîne montagneuse aux sommets
enneigés,roseaux dorés par un soleil ayant entamé une bataille
perdue d'avance avec de lourds nuages noirs et menaçants,poules
d'eau,aigrettes,cormorans,grenouilles...tout un monde de bels
emplumés s'égayant en tous sens,barbotant,seul leur concerto
cacophonique trouble le silence de ces lieux superbes et sauvages,que
nous longeons durant un temps.
Peu de
circulation,route tape cul au revêtement grossier,vent dans le
nez,il fait froid,très froid. En quittant le lac,notre serpent de
bitume,virevolte,tournicote s'envole en de rudes montées abruptes.
22 kms du départ,mon bucéphale,louvoie de l'arrière en émettant
d'étranges sons,crevaison !!!!! Patrick est loin devant,une voiture
interceptée,le préviendra de mon infortune,ma douce moitié se
précipite à mon secours,sort son matériel de Mac Gyver,mais voilà
au moment de coller la rustine sur le pneu,zut,plus de colle.... et
là même sa b.....et son couteau ne peuvent rien pour lui,fort
heureusement en réserve dans ses sacoches,une chambre à
air,flambant neuve,nous sommes sauvés.
Paysages alpins
féeriques,formations rocheuses,éperons granitiques,pinèdes.... la
nature nous fait son cinéma, le show est grandiose,c'est bon pour le
moral,route égrenant ses côtes très abruptes,vent sans
pitié,soleil faisant quelques apparitions entre de gros nuages et
quelques gouttes de pluie,c'est un peu le parcours du combattant,au
sein de cette région très peu habitée.
Huglu(1400
habitants),une des rare bourgade de cette étape,le thé nous est
offert sur la place du village où nous passons un moment sympa en
compagnie de quelques locaux,dans la région,la population est moins
expansive,curieuse et plus distante,parfois nos bonjours sont à
peine payés de retour,après toutes ces semaines d'accueil
enflammé,je me sens un peu comme abandonnée !!!!!
Poursuivons,serpentant,me
traînant le long de côtes vraiment abruptes et niquent les pattes,au
sein d'une nature toujours aussi généreuse de sa beauté,gorges
étroites,terrains d'alpage où les rochers semblent comme posés,là,
par des mains d'artiste.....
Tellement rare et tellement beau de le voir sur son vélo!!!! |
Derebucak,vraiment fatiguée,j'y ai fondé tous mes espoirs,une station essence,YOK. Le café de la place,personne ne nous parle ni ne répond à nos salutations,le thé nous est cependant offert !!!!!! Interrogé quant à la possibilité de trouver un lieu pour dormir,un homme nous emmène dans un immense appartement qui semble à l'abandon,je crois toucher du doigt le paradis,mais lorsqu'il se lance,renseignements pris dans une diatribe à laquelle je ne comprends rien si ce n'est qu'il nous en coûterait 30 TL (j'ai grillé tous mes jetons dans le clapier à lapin de Konya),je n'ai plus qu'à repartir la queue entre le jambes et poursuivre ma route.
Quelques 10
kilomètres plus loin,une aire de pic nique et mosquée au sein d'un
cadre idyllique. Le temps est vraiment pourri,vent violent,sol
détrempé,menace de pluie. Nous nous tâtons longuement,quasiment
pas un chat ne passe dans les parages,peu de chance pour que
quelqu'un vienne y prier,après maintes hésitations,nous nous
invitons dans la maison d'Allah en espérant du fond du coeur
n'offenser personne !!!!!!!
Bergerie,le
11.05.2014
Etape:64
kms
La nuit ne fut pas
très bonne dans la glaciale maison d'Allah,au réveil,humeur morose
et âme peu combattive alors que je me sais repartie sur les sentiers
de la guerre. Températures polaires,transie de froid,les guibolles
en compote,durs les premiers coups de pédale,les nuages emmaillotent
les chaînes montagneuses de leurs blancs voiles cotonneux,cigognes
insensibles au froid barbottent dans les flaques d'eau jalonnant
notre route plate,cela ne saurait durer,en construction. Soleil
faisant de timides apparitions entre les nuages, rares
véhicules,carrières de marbre exploitées par les chinois,piste
détrempée bordée d'un côté par une étroite plaine cultivée,de
l'autre par des parois rocheuses abruptes,s'élevant infiniment et
interminablement à travers une nature minérale revêtue de pinèdes
jusqu'au col de Gevenli Beli (1510 m),le froid de ce début d'étape
n'est plus qu'un vieux cauchemar.
Les joies
de la descente ne seront que de courte durée,quelques petits hameaux
nichés au creux de la montagne,rencontre avec un sympathique
cycliste hollandais faisant route inverse. Ibradi,petit bourg et son
traditionnel café à l'accueil toujours aussi tempéré avant de
nous lancer à nouveau à l'assaut de la montagne,les kilomètres
sont grignotés à coups de pédale poussifs,les somptueux paysages
sont là pour accrocher l'oeil et divertir le corps souffrant dans
l'effort,gorges étroites,hautes parois rocheuses,précipice
vertigineux,troupeaux de chèvres..... pour Patrick il en bave et
c'est beau de mon côté par moments j'en bave et c'est tout !!!!!
Nuages noirs s'amoncelant dans les cieux noircissants,vent soufflant
en rafale,grandiose nature revêtant des airs inquiétants,orage aux
fesses,je ressens comme une urgence à pédaler afin de trouver
refuge pour la nuit.
La montée n'en finit
pas,un petit plateau,une bergerie exhalant d'infâmes odeurs de bouc
n'invitant guère à l'arrêt,la perspective sur la route à venir
est telle,qu'elle nous cloue sur place,COTE. Au détour du premier
virage,un couple de paysans faisant récolte d'herbes et autres
plantes,nous indique une bergerie de pierre inhabitée et nous invite
à nous y installer pour la nuit,épuisés,nous ne saurions refuser
l'offre qui tombe comme du pain béni. Abri certes sommaire mais au
sein d'un cadre majestueux et sauvage,le ciel peut désormais nous
tomber sur la tête,nous avons un toit !!!!
Quelques bouts
de bois suffiront à Patrick pour nous fabriquer un feu,douce chaleur
réchauffant l'âme et le corps tandis que nos estomacs engloutissent
tous ce que contiennent nos valoches. Orage évité,couchés avant le
soleil,nous serons réveillés par Cem,le chevrier saisonnier vivant
dans le campement non loin de là,tout joyeux,il nous apporte,fromage
et yoghurt tout en nous invitant pour le thé du lendemain. Pas de
place pour l'irritation devant une attention aussi touchante. Cem n'a
pas tourné les talons,que le sommeil déjà nous a regagné.
Gundogdu,le
12.05.2014
Etape:68
kms
Merveilleuse nuit de
sommeil,la belle surprise d'un ciel d'azur sans un nuage éclairé
par un soleil déjà ardent. Maisons faites de bric à broc,campement
de fortunes des chevriers saisonniers,veillant sur quelques 1'000
biquettes. Nous y sommes chaleureusement accueillis par Cem et sa
maman,qui mettent les petits plats dans les grands,feu crépitant
dans le fourneau,fromage,yoghurt,confitures,tomates,pain,thé.....nous
sommes traités comme des rois. Passons un moment en leur
compagnie,au milieu des biquettes gambadant follement avant de
reprendre la route,lestés d'un sac contenant,pommes et oranges
tandis que me sera offerte une paire de chaussettes.
Route
montueuse poursuivant longuement sa folle et rude ascension,nous
gratifiant de sublimes vues plongeantes sur la vallée et son fleuve
Mavnagat aux eaux couleur d'aigue-marine. Grande est l'émotion en
apercevant dans le lointain,la mer Égée,je me sens envahie de
fierté en réalisant que je les ai traversé toutes ces chaînes de
montagne,j'ai réussi !!!
Arrivés au bout de
ce titanesque effort,enfin nous plongeons,descente vertigineuse sous
le regard éberlué des troupeaux de chèvres détalant sur notre
passage,la route pourrie n'est cependant pas de tout repos,éviter
les chausse trappe,trous,bosses.....véritable jeu d'adresse,il
serait un peu dommage de se croûter après cette débauche
d'énergie.
Choc culturel et
thermique,le changement de décor est hallucinant,paysages alpins se
transformant rapidement en paysages méridionaux,tout à coup j'ai
pris place à bord du TGV !!!! Les roues de mon bucéphale chantent
tandis que je serre les fesses sur la selle,défilent devant mes
yeux,cascades aux eaux
cristallines,cerisiers,oliviers,noyers,figuiers de
barbarie,fleurs,vignobles,champs de
blé,maïs,cyprès,orangers,citronniers......une nature en fête qui
a des airs de Toscane.
Le retour sur la
nationale nous emmène dans un nouveau monde,retour dans le bruit et
la fureur de notre trépidante vie moderne,grand boulevard,flot
ininterrompu de véhicules pétaradant,barres
d'immeubles,magasins,enseignes publicitaires..... comme elle nous
paraît loin tout à coup notre petite bergerie,notre séjour dans la
montagne fut si intense,qu'il me paraît avoir duré bien plus
longtemps qu'en réalité. Mavnagat,grande ville moderne,nous y
régalons nos estomacs de succulents lamachun(sorte de pizza
turque,pâte très fine recouverte de viande
hachée,tomates,oignons)avant que Patrick n’exauce mon
souhait,celui de voir la mer. Nous restons éberlués devant le
spectacle s'offrant à nos yeux,tout n'est que complexes hôteliers
luxueux,plage recouverte de chaises longues et ombrelles,touristes de
tous poil,faisant bronzette,s'agitant autour d'un filet de volley
ball.....mais où est la mer,et la Turquie dans tout cela,courage
fuyons !!!!
Route
plate très circulante,chaleur importante,un immense complexe
hôtelier composé d'une station essence,magasin,piscine....
abandonné,un gardien tellement déprimé qu'il semble au bord du
suicide,nous donne la permission de planter notre guitoune dans la
pelouse jadis réservés aux camping cars,le malheur des uns fait le
bonheur des autres !!!!!!!
Antalya,du
13 au 16.05.2014
Etape:71
kms
Nuit
perturbée par le bruit sourd de la route dévidant son flot
ininterrompu de véhicules. Ce que nous avons gagné en
platitude,nous l'avons perdu en quiétude. Route nationale,très
circulante,jalonnée,de complexes touristiques,enseignes
publicitaires,villes identiques se succédant sans surprise aucune.
Au loin se dessine joliment une chaîne montagneuse aux formes
découpées. Bus touristiques en pagaille déversant sa cohorte de
touristes(principalement russes et allemands),à nos joyeux bonjours
ne répondent que regards mornes et en coin,chacun dans son monde,je
suis impressionnée de constater que tout ce monde,en vacances
pourtant,n'affiche pas la mine heureuse du bonheur. Je sens que notre
monde celui dans lequel nous nous préparons à faire notre entrée
après 4 ans de vadrouille,s'impose à moi, à pas feutrés,par
petites touches.
Bifurcation vers une
route un peu plus tranquille,plaines maraîchères avant que notre
horizon ne soit à nouveau envahi par les complexes hôteliers,
vision qui a quelque chose d'une catastrophe qui n'a rien de
naturelle.
Les faubourgs
d'Antalya sont atteints,il ne nous reste plus qu'à trouver Omer(warm
showers)et son logis qui nous attendent. En ce jour notre bonne
étoile était vraiment là fidèle au rendez-vous. Avons été
beaucoup plus rapides que prévu,la veille avait envoyé un message
pour rectifier la date de notre arrivée,n'ayant eu l'occasion de
consulter à nouveau notre boîte e-mail,n'avait pu prendre note du
message d'Omer,nous disant qu'il quittait la ville en ce jour et ne
serait de retour que deux jours plus tard. L'adresse repérée,un
sympathique chauffeur de taxi,appelle Omer pour le prévenir de notre
arrivée,ce dernier venait de quitter la ville,il lui suffira de 10
minutes pour nous rejoindre,nous introduire dans son petit studio
qu'il met à notre disposition avant de repartir vaquer à ses
occupations. Que de luxe,petit studio doté,d'une
cuisinette,salle-de-bains,canapé clic clac..... tout cela rien que
pour nous,nous sommes les maîtres de ces lieux,il ne nous reste plus
qu'à nous poser,reposer et profiter de notre séjour.
Antalya(1,2
millions d'habitants), vieille ville hautement touristique cernée
par un champignon urbain moderne ayant explosé au cours de ces
dernières années. Superbes vieilles
maisons,mosquées,ruines......survivant au milieu des bazars
touristiques,restaurants,hôtels,boutiques en tous genres..... Bien
qu'encore hors saison,la foule s'y presse déjà,malgré tout il
reste facile d'y trouver quiétude et sérénité,nous coulons des
jours heureux,récupérons,Omer fera une brève apparition. Assistons
à quelques manifestations de colère provoquées par la tragédie
minière. Profondément attristés et peinés,en colère contre un
monde où le profit économique pèse beaucoup plus lourd que la vie
d'un Humain !!!!!!!
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