Inde
Utar
Pradesh
Varanasi,le
26.01.2014
La
ville commerçante est calme en ce jour de fête nationale,les ghats
quant à eux,grouillent d'une foule inouïe et bigarrée de
pèlerins,bains sacrés pour certains tandis que d'autres en barques
et bateaux prennent le fleuve d'assaut. Les tiroirs caisse des
commerçants font gling gling !!!! Sacrées les eaux du Gange
,pourtant je n'y mettrais,pour rien au monde,même le doigt de mon
petit orteil,sous peine d'y attraper la gangrène. Nuées de cerfs
volants,dansant dans le firmament,passe temps favori des habitants de
Varanasi,hommes et enfants de tous âges,tirent gaiement sur les
ficelles depuis les terrasses de leurs maison. Pour les
mendiants,distribution gratuite de nourriture,offerte par diverses
associations,d'immenses gamelles fument le long des ghats,tandis
qu'ils attendent assis en rang d'oignon leur pitance.
Pour
nous barbouille et courante,au terme de notre séjour varanasien,les
joies d'un voyage en Inde qui ne serait pas ce qu'il est sans ces
aléas. Un peu raplapla,journée léthargique avant de nous rendre
pour une dernière balade sur les ghats afin d'y accomplir une
puja,barquettes de fleurs au milieu desquelles brille une petite
bougie,que nous envoyons voguer sur les eaux du fleuve sacré,flamme
vacillante hésitant à prendre son envol accompagnées de nos
prières silencieuses à l'intention de toutes les personnes qui nous
sont chères. C'est tellement beau que j'en ai les larmes aux yeux.
Bahodi,le
27.01.2014
Etape:75
kms
Véritable crève
coeur que de préparer mes valoches pour larguer les amarres, excitée
à l'idée de poursuivre ma route,je peine cependant à m'en aller,il
est des lieux que je ne voudrais jamais quitter,mais dans lesquels je
ne vivrais pour rien au monde,paradoxes !!!!
Quitter
Varanasi,beaucoup plus aisé que d'y accoster. Ravie de constater que
les routes ont eu le temps de sécher,nos bucéphales amoureusement
bichonnés par Patrick,garderont ainsi plus longuement leur
fraîcheur,tout comme nous d'ailleurs. 20 kms de route pourrie et
tressautante à travers plaine agricole,fabriques de tapis, où
agglomérations plus ou moins grandes se suivent sans discontinuer.
Grouillement humain se diluant,avant que la route ne se transforme en
une magnifique bande de bitume bien lisse large de deux voies et
suprême luxe,une bande d'urgence,même dans mes rêves les plus fous
je n'aurais osé y penser. Il est dit que la perfection existe
rarement dans notre monde bucéphalique,Eole,ce vieux compagnon
presque oublié,de face nous oblige malheureusement à appuyer
fortement sur les pédales. Malgré tout,les kilomètres s'avalent
allègrement,chemin faisant,multiples rencontres avec une population
des plus chaleureuse et accueillante,un thé nous sera offert,même
l'Inde se montre capable de ces petits gestes quotidiens qui savent
si bien réchauffer le coeur. Chaleur agréable,juste idéale pour le
pédalage.
Les choses se corsent un
peu lorsqu'il est l'heure de trouver à se loger,point d'hébergement
même dans les villes d'une certaine importance,ne nous reste plus
qu'à nous rabattre sur un dhaba(gargote) de bord de route,sans doute
coutumier de ce genre de fait au vu de la facilité qu'ils ont pour
nous accepter. Il semblerait que ce soit la solution que nous ayons
trouvée pour notre voyage indien. Deux tables mises côte à côte
nous serviront de couches. Après-midi relaxe où étonnament nos
amis indiens nous fichent une paix royale.
Allahabad,du
28 au 30.01.2014
Les
camions profitant surtout de la nuit pour rouler,le trafic
s'intensifie de manière effrayante,file indienne discontinue !!!
Couchés comme des poules il est cependant difficile malgré la
fatigue de trouver le sommeil,véhicules vrombissant d'un côté et
téléviseur à plein volume de l'autre. Véritable sapin de Noël
ouvert 24 h / 24,la moitié des travailleurs du dhaba,passent le
temps les yeux fixés sur la petite lucarne hurlante dans l'attente
du client, tandis que l'autre dort sur sa litière de paille. Semaine
de 7 jours pour ces travailleurs de l'ombre qui jamais ne quittent
les lieux de leur labeur.
Malgré une nuit en demie
teinte,le matin brumeux,nous trouve en relativement bonne forme.
kilomètres de route plane et lisse à travers plaine agricole,champs
de colza,cannes à sucre......paysages uniformes et reposant ne
variant guère au cours des étapes,vent toujours de face. Une
population toujours aussi amène et chaleureuse,l'occasion de
quelques rencontres sympathiques. Les mollets s'activent à notre
passage,les Indiens semblent tout aussi enclins que les Népalais à
faire étalage de leurs force virile se lançant quasiment
systématiquement dans des courses poursuites,un sourire béat
s'affichant sur le visage du vainqueur lorsqu'il me dépasse,ce qui
n'est guère difficile,un peu plus compliqué avec Patrick qui se
prend volontiers au jeu,et oui entre mâle tout n'est bien souvent
qu'une question de testostérone !!!
Bifurcation,retrouvons
une route étroite lépreuse et bosselée à travers une belle
campagne jalonnée de fermettes,troupeaux de
buffles,chèvres,moutons,crottes servant de combustible séchant au
soleil,joyeuse marmaille dépenaillée et crotteuse s'égayant en
tous sens. Scènes rupestres hautes en couleurs et en odeurs !!!!! Le
trafic y est important,la vigilance est de mise.
Rencontre avec un cycliste chinois |
En traversant le
pont Shastri,vision hallucinante de millier de tentes ayant pris
possession des berges de la rivière Yamuna.
A la périphérie
d'Allahabad,règne un chaos indescriptible,véhicules en tous genres
avancent cahin-caha,pare choc contre pare choc,enchevêtrés de
piétons,animaux divers,y trouver sa place et s'y frayer un chemin
devient un art où la patience est l'une des principales actrices.
Des flics mollasson,moustaches bien taillées,ventre protubérant
dans leurs uniformes kaki, tentent plutôt mal que bien d'y faire
régner un certain ordre. Après une lutte acharnée,nous réussissons
à nous extirper de ce trafic démentiel pour atterrir devant les
façades clinquantes de l'hôtel Prayag,où une chambre
tranquille,juste ce dont nous avons besoin,propre et basique nous
attend. Quelque peu fatigués,nous nous immergerons dans la folie
urbaine,juste le temps de nous restaurer,la visite touristique
attendra demain.
En cas d'incendie nous sommes sauvés |
Allahabad,1,2
millions d'habitants,revêtant une grande importance dans la
mythologie hindoue,l'histoire indienne et la politique moderne.
Brahma,le dieu de la création aurait atterri sur la terre à
Allahabad ou Prayag connu sous le nom du roi des centres de
pèlerinage. Sangam,lieu de rencontre de deux des rivières les plus
sacrées de l'Inde,le Gange et la Yamuna avec la mythique rivière
Saraswati. C'est la plus célébrée des 4 villes saintes accueillant
la Kumbh Mela (rassemblement de pèlerins....)ayant lieu tous les 12
ans,celle de 2013(plus grand rassemblement humain de la planète a
attiré le jour du bain principal quelques 32 millions de pèlerins
et 100 millions au cours des 52 jours qu'a duré le festival),tous
les 6 ans y prend place la Hard Mela tandis que chaque année comme
c'est le cas en ce moment s'y tient un festival de moindre
importance,la Magh Mela.
Paradoxe d'une ville
tenant une place aussi prépondérante dans la vie religieuse
hindoue,elle renferme en son sein une importante communauté
musulmane,minarets de nombreuses mosquées s'élevant élégamment au
dessus de la ligne d'horizon,elle vit au rythme des appels du
muezzin. Un parc miteux,contenant 4 superbes tombes moghol,ravivant
le souvenir d'autres mosquées et monuments visités dans d'autres
pays musulmans.
Les
chrétiens eux non plus ne sont pas en reste,l'immense cathédrale(la
plus grande d'Asie) de tous les saints,a plutôt belle allure.
Bâtiments et monuments d'une
beauté incontestable,ne pouvant rivaliser avec l'attrait et la
fascination qu'exerce sur moi la vie trépidante de la cité.
Fourmilière humaine gigantesque,bruissante,sollicitant et mettant en
déroute tous les sens,odeurs d'épice,d'encens se mariant à celles
d'urines et de pourriture,beauté d'un visage et d'un sourire cédant
la place à celle de la misère et de la pauvreté. Ville en
décrépitude ayant sans doute connu des jours plus faste,elle
conserve comme des airs d'Angleterre,détritus jonchant le
sol,insalubrité régnant en maître,routes défoncées,et pourtant
je la trouve belle,vibrante de vie,de couleurs. La promiscuité n'y
est pas un vain mot,l'humain n'y laisse aucun espace vaquant.
Spectacle émouvant des familles entières de rickshauwallah,vivant à
l'orée du centre ville,dans de misérables abris de plastic,enfants
pouilleux et dénudés,s'amusant de tout et d'un rien,femmes vaquant
à leurs occupations quotidiennes au milieu de la foule
grouillante,misère humaine tordant les tripes mais n'appelant pas la
pitié elle garde la tête haute,le sourire éclatant et le regard
plein d'une bonté venant du fond des âges. Magistrale leçon de
vie,d'humanité et d'humilité. Une évidence s'imposant à moi,quel
plus cadeau la vie peut-elle nous faire à part celle de se donner
!!!
Magh Mela
Jour
important,propice au bain pour les pèlerins venus assister à la
Magh Mela. Pour les plus fervents,les festivités commencent dès 4 h
du matin,inutile de dire que je gis encore bien au chaud dans mon
lit. Se rendre sur les lieux,un jeu d'enfant,la ville est
complètement désertée,en arrivant sur les rives de la Yamuna,nous
comprenons mieux pourquoi.
Une foule hallucinante de pèlerins
hantent les lieux,agoraphobe s'abstenir,déferlement ayant pris
d'assaut,routes,ponts,berges de la rivière où sont installées des
milliers de tentes,ville éphémère érigée le temps que dure les
réjouissances,elle en a tous les attributs,petits commerces y
tiennent le haut du pavé,marchands de légumes,de
combustible,gargotes,coiffeurs,cordonniers......seuls les Indiens
semblent capables de faire régner l'ordre au sein d'un tel chaos.
Ambiance mystique,agitation tranquille dans lesquelles nous nous
plongeons sans hésitation et avec délice. Scènes de vie
extraordinaires défilant devant nos regards fascinés,tous nos sens
alerte. Sadhus haut en couleurs,ashram et leurs flamboyant baba
prêchant la bonne parole,marchands du temple vendant
colifichets,bouteilles pour récolte d'eau sacrée,poudres
colorées,charmeurs de serpent,cohorte incroyable de mendiants et
d'éclopés,véritable cour des miracles,exhibant moignons,plaies
purulentes,pour qui c'est le seul mode de survie,il est bon pour le
karma de tout un chacun de faire offrande à des pauvres,chacun y va
de sa poignée de riz,d'un chapati....(bien souvent jetés dans la
gamelle comme on lance la pâtée à un chien!!!). La ville n'est pas
non plus en reste commerçants et associations font eux aussi
bouillir de grosses gamelles pour la soupe populaire. Pèlerins
pratiquant leurs ablutions rituelles(là non plus je n'y mettrais pas
le petit doigt de pied,même pour laver mes péchés,parcourir le
chemin en vélo devrait amplement suffire à la tâche!!!).......
Etourdie par la foule,débordante d'émotions aussi intenses que
variées,spectatrice de choses que bien souvent je ne comprends
pas,je quitte les lieux avec juste une envie celle de me retrouver au
calme,y repasser les images de cette belle journée en me posant
toujours et encore cette même question revenant de manière
lancinante,quel est le sens de la vie ????
Chulaha,le 31.01.2014
Etape:85 kms
L'Inde j'aurais envie d'y traîner les pieds et les roues,chaque endroit est pour moi une invite à rester beaucoup plus longuement qu'il n'est raisonnable. Toujours triste lorsque je dois quitter un lieu mais tout aussi excitée par ce l'avenir me réserve.
Les villes
indiennes ne sont pas particulièrement matinales,le trafic reste
fluide et lorsqu'il est l'heure de les quitter,l'entreprise n'a rien
de sorcier, retrouvons sans grande difficulté,mais non sans avoir
demandé maintes fois le bon chemin à emprunter. Superbe et large
bande de bitume lisse déclinant toujours avec entêtement sa
platitude à travers une campagne peu habitée uniformément
recouvertes de champs de colza,orge,blé.... Trafic tellement
clairsemé que je doute par moments de me trouver toujours en Inde.
Eole dans le nez souffle juste suffisamment fort pour nous embêter.
Au fil des kilomètres qui défilent sans effort,la route se dégrade
par instant et montre quelques changements,faux plats
ascendants,tandis que commencent à apparaître quelques
collines,heureux changement après des jours et des jours à se
balader dans le même décor. Drapeaux colorés flottant au vent,un
dhaba perdu au milieu de nulle part,se profile à
l'horizon,incertains quant aux possibilités que la route pourraient
nous offrir,nous nous y arrêtons,accueil sympathique,l'endroit nous
semble idéal pour y élire domicile le temps d'une nuit. Nous
aurions rêvé d'un après-midi plus tranquille,deux cars déversent
leurs flot de pèlerins,s'amassant autour de nous,envahissant notre
espace,nous matant de leurs mirettes interrogatrices,nos bucéphales
inspectés sous toutes les coutures deviennent le sujet principale de
leur conversation. Serions-nous les nouvelles stars bollywoodiennes
??? Plutôt rigolo mais surtout avec le recul !!!!! Ce petit monde se
tire enfin,tandis que le proprio des lieux fait son
apparition,personnage d'une part pas forcément sympathique et
d'autre part,il veut nous enfler sur le prix du thé. Il n'en faut
pas plus à mon poussin pour prendre la mouche et décréter le
départ malgré le soleil déclinant à l'horizon. Une heure plus
tard,nouveaux drapeaux flottant à l'horizon,nous sommes sauvés,un
dhaba,accueil des plus chaleureux,clarifions prix et tarifs,avant de
nous poser définitivement. Dhaba,synonyme pour nous de pain béni,il
n'en va pas de même pour les travailleurs qui y officient,pauvres
bougres,nombreux psychotiques,mômes à l'enfance volée par un
labeur bien trop précoce,y sont enchaînés à leurs lieux de
travail pour un salaire sans doute dérisoire. Un avenir sans avenir
pour ces travailleurs de l'ombre,qui malgré tout,nous entourent de
leurs chaleureuse prévenance éclairée de sourires radieux. Notre
thali englouti,le propriétaire des lieux fait son apparition,nous
proposant une pièce,fermant d'une porte,une table qui fera office de
lit y est emmenée,notre chambre gratuite pour la nuit,quelle belle
surprise !!!!
Chitrakoot du 1 au 3.02.2014
Etape:52 kms
Etape:52 kms
Longue nuit étonnament tranquille en équilibre sur notre table étroite. Brume de saison ayant pris possession de toutes choses,formes et paysages estompés,notre lot quotidien au moment de décoller. Route inégale toujours aussi paisible,véritable balade bucolique,plaines et champs se succédant avant que notre décor ne change subrepticement. Léger yoyo,nous emmenant sur un plateau très peu habité,une terre pierreuse,pauvre et inculte,avant de retrouver une belle campagne légèrement plus vallonnée,habitée de nombreuses variétés de volatiles haut en couleurs,singes,émaillée de retenues d'eau. Cultures et superbes fermes en pisé aux toits de tuile,grands troupeaux de vaches,buffles,chèvres,moutons,cochons parmi lesquels s'égayent une nombreuse marmaille. Lors de nos arrêts casse-croûte,attroupement garanti,animaux de zoo que l'on reluque sous toutes les coutures avec le sourire tout de même. La route apporte son lot quotidien de chiens écrasés,mauvais karma,si il en est,pouilleux,galeux,efflanqués et faméliques,la race canine ne respire pas la santé. Dans le lointain quelques collines commencent à faire leur apparition.
Chitrakoot,(49'000
habitants)petite ville sise sur les berges de la rivière
sacrée,Mandakini,surnommée,la petite Varanasi en raison de ses
nombreux ghats et temples. Étonnante arrivée sur Ram Ghat,ambiance
surréaliste d'un autre temps,temple,palais aux couleurs
délavées,bordent une rivière où dodelinent grand nombre de
barques hautement colorées,charme suranné,ambiance votive. Une
volée d'escaliers escarpées,nous emmènent au Pitra Smiviti
Vishrangrah lodge,immense bâtiment défraîchi,construit en face du
Bada Math,ancien palace de pierre rose vieux de 300 ans,un lit
trônant tel une nef au milieu d'une chambre aux couleurs pétantes
qui s'écaillent,l'endroit est quelque peu décati et a connu des
jours meilleurs mais possède un charme fou,la terrasse surplombant
le ghat finit de nous conquérir.
Nous passerons
deux jours dans cette ville paisible vivant au rythme des nombreux
pèlerins,priant,pratiquant ablutions et puja rituelles,va et vient
continuel et coloré,la ville semble vivre hors du temps et de notre
époque. Balade le long de la rivière jalonnée d'une multitude de
temples,ashrams que des hordes de singes ont colonisés. Le soir
venu,règne une cacophonie indescriptible et dissonante,chaque temple
entamant simultanément sa mélopée liturgique tandis que les
barques éclairées tels de vrais sapins de Noël voguent sur les
flots.
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