Australie
Côte Occidentale: Le Pilbara
Thermite Nest,le 25.07.2012
Etape: 68 kms
Après ces deux jours de confort relatif,aurais envie de faire la sourde
oreille face à l'appel de la route,partir de ces lieux que pourtant je
n'apprécie pas vraiment me demande un certain effort,aurais envie de rester au
fond de mon duvet,lire,écrire...... m'adonner à toutes ces activités qui me
plaisent tant mais qui n'ont plus place dans mon quotidien,vie d'errance si
prenante qui sait si bien donner,mais qui parfois prend tellement.
Nous nous embarquons en ce jour pour une tranche de plus de 600 kms de
no mans land,nos bucéphales ressemblent à de véritables road trains,des sacs
pendouillent de partout, n'ont jamais été aussi chargés au cours de ce voyage.
Nous quittons en ce jour la côte océanique pour rejoindre l'intérieur du
pays,communément nommé Outback ici en Australie,en passant petit geste de la
main, le coeur un peu serré, je prends congé pour un temps de l'océan Indien.
Le vent souffle violemment et n'est bien évidemment pas en notre faveur. Depuis
quelques jours les personnes rencontrées nous font gentiment remarquer que nous
nous sommes trompés de sens,en cette saison le vent soufflant du nord au
sud!!!!!!!! Nous commencions nous-même à avoir de fortes présomptions sur la
chose,pourquoi faire simple quand on peut faire compliquer,je me le
demande!!!!!!! Un homme averti en vaut deux,il n'y a désormais plus qu'à faire
avec!!!!!!
Fétus de paille trimballés par le vent,nous dansons tels des marins
ivres sur une route serpentine rectiligne à travers de vastes étendues
herbeuses et sèches hérissées de termitières géantes(impressionnant ce que ces
petites bestioles sont capables de construire),odeur de mimosa qui nous
chatouille les narines,un vide plein de tout comme je l'aime!!!!!!! Quelques émeus effarouchés s'enfuient sur
notre passage,animal aux airs ahuris et préhistoriques,plumages s'envolant tel
le tutu d'une danseuse étoile lorsqu'ils courent de leurs démarche
dandinante,il ne manque jamais de me faire rire aux larmes.
Fatigue,mal aux fesses,soleil déclinant,sol trop dur pour planter notre
guitoune,serais capable de me coucher sans autre sur le bord de la route quand
miracle un vaste parking avec vue sur des termitières géantes se présente à
nous,pas un tour de roue de plus,préparation de nos couches, petit coup de
picheton,malgré la charge de nos bucéphales,nous avons réussi à loger notre
pote Stanley dans un petit coin,salade de pâtes dans laquelle je
m'endors,rideau.
Giralia Creek,le 26.07.2012
Etape:58 kms
A l'aube il n'y a que les températures
qui sont fraîches,tête de traviole,corps fatigué,Eole annonce d'ores et
déjà sa présence de manière tonitruante,la journée s'annonce sportive.
Relief accentué,yoyo et faux plats le plus souvent ascendants et
longs,petite départementale exempte de circulation,cheveux aux vent dans le
nez,pilote automatique,petit plateau et moulinage constant,je n'en n'ai cure je
me sens heureuse,il n'en va pas tout à fait de même pour mon poussin,moralement
touché par cette lutte constante contre les éléments,il s'enferme dans sa
bulle,se décourage et je devrai faire usage de toute ma bonne humeur du jour
pour éviter qu'il ne sombre dans le désespoir.
Bush plus pauvre,la végétation se raréfie,les arbres se rabougrissent
tandis que de magnifiques fleurs sauvages colorées font leurs apparition
grandeur de la Nature et magie lorsqu'au sein de toute cette austérité apparaît
en milieu d'après-midi la petite rivière Giralia complètement asséchée en cette
saison,écrin de verdure sur fond de terre ocre au sein de laquelle trônent de
majestueux eucalyptus. Petit coin de paradis que nous nous approprierons le
temps d'un bivouac.
L'heure n'est pas encore
au repos malgré la fatigue. Mise en place de notre campement,collecte de bois
pour le feu vespéral et ravitaillement en eau. Postée en bord de route avec ma
bouteille vide,j'attends l'âme bienveillante qui s'arrêtera pour nous offrir ce
liquide fort précieux,l'attente n'est pas longue,un homme s'arrête et se
propose de nous remplir la totalité de nos bouteilles,quelle aubaine. Tandis
que je m'empresse des bouteilles plein les bras peu désireuse de le faire
attendre,je m'emmêle les pinceaux et m'étale de tout mon long dans la
caillasse,résultat des courses,ai tenté de garder ma dignité mais une fois de
plus ai laissé un peu de peau sur le sol australien cette fois-ci,genoux,coudes
et mains éraflés,j'en suis quitte pour quelques jours de douleur!!!!!
Profitons pleinement de l'instant en compagnie de notre dernier petit verre de rouge(toutes les
bonnes choses semblent avoir une fin) à la lueur de notre feu de camp avant de
nous glisser au fond de nos couches sous l'oeil compatissant d'une lune
grandissante.
Rivière Yannarie,le 27.07.2012
Etape: 80 kms
Depuis que nous avons quitté la côte océanique les différences de températures
diurnes et nocturnes sont encore plus marquées,de l'ordre de 27°C au cours de
la journée et 12°C la nuit. Patrick s'active bien avant l'aube pour réactiver
le feu et me concocter mon café matinal,m'assurant ainsi des conditions de
réveil idéales,quel Homme!!!
Présence soutenue et continue du vent,apparition de hordes de
mouches(véritable fléau du bush australien),relief marqué,l'étape du jour
s'avèrera plutôt ardue. Le moral en berne et fatigué,Patrick se sent au bord de
la rupture physique,énervé par le vent et les mouches inquisitrices qui vous
rentrent dans les yeux,le nez.... désormais il est impératif de fermer la
bouche en pédalant. De mon côté malgré la fatigue et la douleur aux genoux qui
se fait sentir à chaque de pédale,j'exulte et je me sens la reine de cette
région,minière,du Pilbara dans laquelle nous faisons notre entrée en ce jour,la
nature y est si inhospitalière qu'il m'étonnerait fort que le trône me soit
contesté, alors peu m'importe le vent et les montées qui se veulent de plus en
plus prononcées. Highway N° 1 qui n'en n'a que le nom,ruban de bitume étroit
tout aussi exempte de circulation,nature aride,rugueuse,qui au fil des
kilomètres se transforme,une terre de plus en plus rouge,un maquis formé de
petits arbustes,épineux,herbe sèche et piquante,massifs de fleurs sauvages
colorées, plateau rocailleux jalonné de
nombreuses petites barres rocheuses qu'il nous faudra grimpouiller de manière
successive. A l'horizon se dessinent les contre forts de la chaîne montagneuse des Hamersley,amer et but à
atteindre nous indiquant sans erreur possible la route à suivre.
Yannarie rivière,aire de repos gratuite,sur l'une des berge de son lit
asséché,magnifiques eucalyptus,oiseaux bavards et colorés où retraités et
caravanes se pressent en grand nombre. Dénichons un petit coin sympa et
paisible à l'ombre d'un eucalyptus,au près de notre arbre nous vécûmes
heureux,le temps d'un après-midi et d'un confortable bivouac.
Mt Murray,le 28.07.2012
Etape:80 kms
Ruban
de macadam rectiligne jusqu'à l'entêtement,vastitude et infinité des paysages
qui me renvoie à ma petitesse et à mon rien
que je remplis de mon tout,zone aride,une nature toute entière vouée aux
rouges, la terre comme en souffrance décline celui du sang séché:végétation
assoiffée,épineux,arbres rabougris,fleurs colorées,mimosa fleuri,l'orangé
joyeux des petits escarpements,pics et
monticules rocheux. Patrick évite la chute de justesse lorsqu'un grand serpent
sinueux se met en passe de traverser la route devant ses roues.
Le vent,invité toujours aussi inopportun entrave notre progression,la
fatigue commence à se faire pesante,le moral de Patrick est vacillant et j'use
de ma dernière énergie pour le soutenir comme je le peux.
En début d'après-midi,nous atteignons la road house de Nanutara,un
camping caravaning,une épicerie fast food,endroit plaisant,superbe rivière aux
eaux tentatrices,s'y poser restera dans le domaine du rêve,interdit au
camping,nous nous y arrêterons le temps d'un café. Rapide conseil de famille,décidons
de trouver un lieu dans les kilomètres à venir.
Alors que bouteille en main sur la bord de la route je fais le poireau
pour notre ration quotidienne,c'est un 4X4,police du trafic routier chargé de
contrôler tous les road trains de l'ouest australien,à son bord un flic
sympa,offrira à chacun de nous une fraise géante et gouteuse. Au pied du Mont
Murray(215 m),magnifique coin de bush dégagé,vue sublime sur les paysages
alentours,je ne pourrais rêver plus belle maison pour ce soir. Le serpent
rencontré en ce jour nous incite à la prudence, plantons notre guitoune pour
plus de sûreté.
Repos bien mérité en admirant un splendide coucher de soleil,journée de
pédalage terminée,le vent du bush chante à mon oreille un air de liberté!!!!
House Creek,le 29-30.07.2012
Etape:56 kms
Fatigue du fond des âges qui colle tellement à la peau que même le
sommeil n'arrive plus vraiment à la réparer. Moral et bonne humeur sont
cependant au rendez-vous et ils ne sont pas de trop pour soutenir un poussin au
moral toujours un peu vacillant qui peine à maintenir le rythme et doute de ses
capacités.
Univers désertique aux allures préhistoriques de fin ou début de
monde,vision lointaine des Hamersley Range,paysages lunaires,collines sableuses
ou rocheuses,une palette de couleurs qui se décline du brun au ocre en passant
par l'orange,sur laquelle tranche le vert tendre des acacias. Les cadavres de
bovins et de busards jonchent la chaussée comme une signature authentifiant
l'inhospitalité de la nature,une mise en garde contre tout égarement. Univers
qui me prend aux tripes,voyage au bout de moi-même,pensées et rêves s'enroulent
dans ma tête tandis que luttant contre le vent mes jambes fatiguées s'activent
tels des pistons bien huilés grignotant lentement,patiemment ces espaces
insondables et infinis.
House Creek lit de rivière asséché au pied du Mt Stuart,une aire de
repos aménagée,table,toilettes,en partie ombragée par de somptueux
eucalyptus,endroit plaisant et petit nous devrions y être tranquille. Campement
préparé,corvée de bois effectué,notre voeu le plus cher,ne plus rien faire,peut
enfin être exaucé. C'est en fin d'après-midi que débarque Yann,jeune Suisse de
Gstaad,en Australie pour un an afin de pratiquer son anglais. Nous l'invitons à
notre flambée tandis qu'il nous offre un délicieux verre de vin blanc
sec,moment fort plaisant en sa compagnie,il passera sa nuit au près du feu dans
sa couche australienne.
Décidons avant de fermer
l'oeil sur cette journée qui s'achève de nous accorder le lendemain une journée
de repos,la nuit n'en sera que meilleure.
Au matin,Yann inquiet de notre sort nous ravitaille en eau pour la
journée,sucre et serait,si nous étions d'accord prêt à tout nous donner,avant
de poursuivre sa route,la même que la nôtre mais en plus rapide,je suppose.
Les quelques caravanes du
soir ont disparu,les retraités pressés se jettent de bonne heure à l'assaut de
la route,nous laissant les lieux pour nous tous seuls. Une journée au ralenti à
trainer nos carcasses,un repos qui permet au corps d'exprimer toute l'ampleur
de sa fatigue. Un seul jour n'est sans aucun doute pas suffisant,mais les
provisions commencent à diminuer et la route est encore longue.
Cheela Plains,le 31.07.2012
Etape:88 kms
Beaucoup plus pimpants après cette journée de repos,nous levons
tranquillement le camp ne nous donnant surtout aucun objectif de distance,cela
évite de se mettre la pression.
Vent présent qui restera à l'état de brise,route plate sans grand
trafic. La chaine des Hamersley se rapproche,bush omniprésent,paysage changeant
sans cesse mais qui pourrait paraître identique à trop le décrire. En fin de
matinée,une caravane avec à son bord un couple de quinquagénaire
australien,s'arrête à la hauteur de Patrick lui demandant si il veut de l'eau
fraîche et s'enquérant d'un couple franco suisse en vélo(Patrick est tout seul
je suis forcément bien loin derrière),il mettra un certain temps à comprendre
qu'en fait c'est de nous qu'ils parlent. Paul et Paula étaient à Tom Price
voisins de camping avec notre jeune ami Yann,celui-ci leurs a donner comme
mission de nous offrir de l'eau si ils nous rencontraient. Extrêmement touchés
et émus par ce magnifique geste de solidarité nous repartirons avec en poche
une invitation dans le NSW,de l'eau et des oranges,elle est pas belle la vie.
Cheela Plains,comme son nom
l'indique,vastes étendues plates dominées par le Mont Wall (1'000 m),entourée
de quelques formations rocheuses,au loin quelques fermes isolées pratiquant
l'élevage de bovins,nous sommes seuls au monde et bienheureux dans notre monde.
Trop fatigués pour nous préoccuper des serpents et autres bestioles
venimeuses,simple bivouac et feu de camp suffiront à notre bonheur.
Hardey River,le 1.08.2012
Etape:82 kms
Vent qui nous laisse tranquille,jetés comme au hasard çà et là quelques
escarpements rocheux au milieu d'une plaine qui ne semble jamais vouloir finir,
cassent l'uniformité des paysages,synonyme pour Patrick de monotonie tandis que
de mon côté je me délecte du spectacle. Un soleil hésitant qui enflamme l'ocre
des montagnes surgissant au nord,à l'est et à l'ouest,au sud une masse nuageuse
pommelée,des températures en baisse. Quelques gouttes de pluie dans
l'après-midi mais une menace qui ne se concrétise pas vraiment.
Le lit asséché de la rivière Hardey,lieu idéal pour le bivouac de ce
soir,place à notre rituel quotidien,café,feu de camp,soupe de nouilles et le
reste de mon énergie pour partir à la chasse de quelques clichés inédits et
inoubliables.
Fatigués mais heureux du moment présent nous refaisons notre monde,vague
à l'âme,moment nostalgie,d'énormes pensées sont envoyées aux êtres chers qui
nous manquent et avec qui nous partagerions bien de tels instants.
Bellary Creek,le 2.08.2012
Etape:83 kms
Début de matinée frais,absence de soleil,sauvagerie et beauté de
l'environnement. Aux alentours pas âmes qui vivent,la nature reste le domaine
des busards,aigles,bande de cacatoès,perroquets colorés et autres volatiles aux
noms inconnus. Les montagnes se rapprochent et prennent forme.
Paraburdoo,petite bourgade minière émergeant d'une vallée poussiéreuse
face à une mine montagne entaillée,vidée de ses tripes,sillonnée par les 4X4
des diverses compagnies,site interdit au public. Parc ombragé transformé en
véritable baisodrome pour cacatoès en folie,BBQ,eau potable,supermarché.... une
vraie ville quoi!!!!! Le choc est d'importance après avoir vécu en véritables
sauvages durant quelques 10 jours. Quelques achats pour compléter nos réserves
et nous concocter un brunch gargantuesque. Patrick ne perd pas le nord ,se rue
dans le magasin d'alcool et en ressort
heureux et requinqué,son ami Stanley sous le bras.
Redémarrons en début d'après-midi,la route se vallonne avec l'approche
des montagnes et a complètement perdu de sa tranquillité,les mineurs des
différentes compagnies,road trains chargés de minerai semblent s'être donné le
mot et nous voilà d'un seul coup d'un seul sur les périphériques parisiens,pas
drôle du tout.
Le
lit de la rivière Bellary,éloignée de la route nous accueillera pour cette nuit
de libation. Couches préparées,tranquillité et sérénité retrouvées,ciel
splendide et étoilé,demain la pleine lune,nous trinquons et retrinquons au coin
du feu à la réussite de cette épopée à travers le bush qui devrait se terminer
demain avec notre arrivée sur Tom Price,il est temps,nous avons la couleur du
bush,sentons la saucisse fumée voir bien pire,la douche devient une nécessité.
Fatigue aidant,les quelques petits verres que nous nous sommes envoyés laissent
des traces,nous nous enfonçons dans nos couches pour sombrer la minute suivante dans le sommeil du juste.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire